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La déesse Petra

Petra Kvitová, Wimbledon 2014, © Ray Giubilo

Le prénom Petra vient du grec « petros » qui signifie « pierre, rocher ». Bien que ces notions de dureté et de résistance prennent tout leur sens lorsque Petra Kvitová s’empare de sa raquette de tennis, surtout sur les terres vertes de Wimbledon, paradoxalement, son visage évoque quant à lui la douceur. Il y a en effet la douceur de sa peau, mais surtout celle de son regard. Un regard d’une telle impénétrabilité qu’il semble comme figé quelque part dans le temps, finalement, d’une telle simplicité qu’il fait jaillir le feu de la grâce. De la même façon que la femme représentée dans les grandes peintures de la Renaissance italienne, Petra est sereine, et de son iris couleur déesse elle fait fléchir les cœurs et les genoux des gens qui, par envie ou par mégarde, le rencontrent. 

Puis il y a cette lueur vive dans son bleu qui frétille impatiemment. Celle-ci contraste avec les ridules et les ombres prolongées sous ses yeux, stigmates du temps nous informant peut-être qu’elle s’est échappée d’un tableau de Botticelli vieux de 500 ans… Il émane d’elle la même pureté qu’on retrouve dans la célèbre œuvre picturale « La Naissance de Vénus », mais il y aussi chez la joueuse Tchèque, la détermination d’une grande guerrière. Il est vrai que sa structure physique athlétique,  sa fabuleuse puissance, sa longue chevelure blonde, ses grands yeux bleus ainsi que sa rage de vaincre ne sont pas s’en rappeler la déesse nordique Freyja, la première des Valkyries.

Jamais elle n’abandonne. Pour célébrer ses incroyables passing-shots en bout de course et autres jolis coups, elle serre souvent le poing en l’accompagnant d’un cri véhément tout en fixant le sol. Alors qu’elle regarde vers le bas, du haut de son mètre quatre-vingt-trois, elle oblige ironiquement ses adversaires à lever la tête vers les cieux, en direction de sa véritable demeure. Bien qu’elle soit démonstrative, elle n’est cependant jamais dans la provocation, pas d’œillades hautaines ou de grands airs vainqueurs. Elle garde toujours une attitude exemplaire, une attitude à la fois concernée par le jeu et les enjeux mais en même temps détachée de tous les éléments qui pourraient lui nuire. Comme peu de joueuses et de joueurs, Petra semble avoir parfaitement assimilé le concept nietzschéen de l’Amor fati – locution latine se traduisant par « l’amour du destin ». Avec cette extraordinaire sérénité et son intense présence, elle donne effectivement l’impression d’accepter son sort. Pour preuve, elle est tout aussi magnifique et son sourire tout aussi radieux dans la victoire comme dans la défaite. Parce que dans le fond, qu’a-t-elle à craindre, ne porte-t-elle pas au creux de sa main gauche les marques de son invulnérabilité ?

Petra Kvitová, Wimbledon 2015, © Art Seitz