Gilles Simon :
touché par la grâce
Par Myriam Bouguerne
Curieux et fascinant personnage que Gilles Simon… Bien qu’il soit un homme de son temps, il y a dans sa structure physique et sa façon d’être une force poétique, quelque chose d’absolument grand, vertigineux et intemporel que l’on ne retrouve que dans certaines œuvres des arts picturaux. Sa grâce naturelle, son teint pâle et délicat, ses cheveux châtains ayant tendance à boucler, son regard profond intensifié par des yeux d’un insaisissable bleu clair tendant vers le vert, et son corps à la structure et à la musculature quasi-christique évoquent effectivement quelques personnages mythiques représentés dans des œuvres de la Renaissance. Fort d’une certaine finesse de corps et d’esprit, ses airs de vieil éphèbe lui donne une féminité virile peu commune qu’on retrouve notamment de manière symptomatique dans les représentations androgynes de l’artiste Michel-Ange ; à défaut d’être son amant, le Français aurait très bien pu être l’une de ses muses et lui servir de modèle.
Il est d’une incroyable beauté, une étrange beauté qui s’affranchirait presque, surtout dans ses plus jeunes années, des âges et du genre. Une beauté se rapprochant de la « perfection », où du moins l’idée que s’en faisaient Michel-Ange ou Léonard de Vinci. Ils la recherchaient constamment et arrivaient admirablement à l’extraire dans quelques-unes de leurs œuvres. Celle-ci est davantage flagrante lorsque Gilles Simon se déplace sur un court de tennis et exécute certains de ses gestes. Il n’est pas un joueur dont le jeu repose sur la force ou la puissance, il est au contraire très agile et possède une grâce infinie que l’on remarque notamment dans ses déplacements vifs et délicats nous donnant l’impression qu’il court sur nuage et qui nous renvoient là encore à une certaine féminité, mais aussi à des périodes tennistiques bien lointaines.
Cette grâce peu commune, on l’aperçoit également dans son revers et ses fameux passings en bout de course, les gestes sont exécutés dans un tel relâchement, une telle précision que pendant un temps très limité celui-ci semble s’allonger en même temps que le geste, lui, se prolonge à l’infini pour enfin se multiplier et atteindre une sorte d’état de grâce d’une pureté absolue. Une pureté rare dans le geste que l’on peut comparer à celle présente dans les fresques ornant divinement le plafond de La Chapelle Sixtine. Là-bas aussi les bras se tendent continuellement, les poignets se relâchent pour effleurer du bout des doigts les cieux renfermant La Révélation.