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Et si l’ATP sélectionnait son équipe de football ?

© tenisweb.com

En cette funeste année 2020, la question du GOAT revient (trop) souvent sur le tapis. Alors que le débat fait rage en ce qui concerne le tennis, le football vient de perdre l’un de ses prétendants au titre de Greatest of All Time : le mythique numéro 10 argentin Diego Maradona, emporté par un cœur aussi généreux dans ses excès que dans son génie. Et si le circuit ATP décidait de former une équipe de football pour lui rendre hommage lors d’un match de gala ? Ou mieux encore, une liste des 22 qui prendrait part à un tournoi en son honneur ? Qui serait son buteur attitré et par qui serait-il entouré ? Nous avons décidé de créer notre sélection idéale secondée par un staff technique de niveau mondial. Le tout avec un zeste de subjectivité assumée et surtout une cuillère à soupe de mauvaise foi.

 

Les éléments extérieurs

L’arbitre : Félix Auger-Aliassime. N’ayant jamais gagné ne serait-ce qu’un set en finale en sept participations, le Canadien a trouvé le moyen d’éviter une huitième déconvenue, à l’instar d’un Français présent un dernier dimanche de Roland-Garros : arbitrer ladite finale.

Une absence notable, celle des juges de ligne, histoire d’éviter une expulsion potentielle du plus Djokosmic de nos Galactiques pour une sombre histoire de sphère perdue.

© Ray Giubilo

Le staff technique

Le coach principal : Patrick Mouratoglou, clairement déboussolé par le fait que le coaching est officiellement autorisé dans ce sport. Le plus humble des académiciens de la petite balle jaune en profitera pour se trouver une nouvelle croisade : l’autorisation de l’utilisation de la VAR par les entraîneurs, une sorte de coach challenge (toute ressemblance avec une règle existant dans le monde du hockey sur glace serait purement fortuite).

L’entraîneur-joueur : Yannick Noah. Pas assez de place sur le banc pour les ego du coaching staff dans son ensemble. Le fils de Zacharie, ancien footballeur, s’occupera donc des démonstrations pratiques des dogmes développés dans le vestiaire. Et on vous parie que la condition physique du dernier vainqueur français en Grand Chelem ne ferait pas tache sur un terrain de sport 38 ans après son triomphe parisien. Pas plus que celle de Milos Raonic après le confinement en tout cas.

La cellule de préparation mentale : la fameuse triplette Nick Kyrgios – Bernard Tomic – Fabio Fognini. Au menu, cours accéléré de tanking, stage d’intimidation du corps arbitral et de trash talking bilingue pour les nuls. Guillermo Coria et sa finale de Roland-Garros 2004 leur serviront de cas d’école pour les fusibles fondus les plus irréparables au sein de l’équipe. 

Le préparateur physique : qui d’autre que Benoît Paire ? Ses exercices de gainage concentrés sur le foie et l’estomac feront merveille pour les apér… les matches importants. Sa capacité à collaborer étroitement avec la cellule psychologique aura forcément une importance cruciale elle aussi.

Le kiné : Juan Martin del Potro. Le compatriote du « Pibe de Oro » mériterait le titre de docteur honoraire ès physiopathologie, tant sa connaissance des parties amovibles d’un poignet ou d’un genou est étendue. C’est une tour de Tandil presque aussi vacillante que sa collègue de Pise qui se rendra au chevet des joueurs blessés à défaut de fouler la pelouse. Il sera secondé par Ivan Lendl qui se concentrera en priorité sur les muscles zygomatiques, sa grande spécialité.

Le préposé aux statistiques et au découpage de citrons : Gilles Simon. Le plus grand théoricien du tennis français mettra sa science tactique alliée à l’amertume des agrumes, dont il assure le débit, au service du tableau Excel de son équipe pour le plus grand bonheur de tout un chacun.

Le chargé de communication : Roger Federer. Même lorsqu’il se fait attaquer de front par Greta Thunberg herself pour ses liens avec une banque impliquée dans l’industrie des énergies fossiles, le Swiss Maestro est capable de produire une réponse aussi dénuée d’aspérités qu’une chaîne de montagnes du plat pays. La com’ du Courts FC ne sera probablement pas aussi excitante que si José Mourinho était à la barre, mais elle ne sera jamais prise en défaut.

Le responsable logistique et intendance : Boris Becker. L’expert en enchaînement service-volée et faillites multiples se chargera de réserver les vols, hôtels et autres restaurants étoilés bien au-dessus de ses moyens pour ses protégés du Courts FC. Il est à noter que le service du petit déjeuner des joueurs sera assuré gratuitement par Stan Wawrinka et Dominic Thiem, distributeurs de pains devant l’Éternel, et par Gaston Gaudio, spécialiste du double bagel de fin d’année. Le service et les couverts, quant à eux, seront évidemment l’affaire de Michael Chang.

Les coiffeurs : si 2020 nous a appris quelque chose, au rythme de leurs fermetures et réouvertures, c’est l’importance des coiffeurs, même dans le sport. C’est pourquoi le Courts FC a choisi parmi ce qui se fait de mieux en matière de coupes (on parle ici de trophées et pas de ce qui reste de leur cuir chevelu) : Pete Sampras et Andre Agassi. Même s’ils se sont souvent crêpé le chignon au cours de leur carrière, on est sûrs qu’ils s’entendront au poil sur ce coup.

Le comité d’organisation des jours off : Marc Rosset, Marat Safin et Goran Ivanisevic. Leur longue expérience des bars et autres boîtes de nuit du monde entier étant inégalée (sauf peut-être par le regretté Vitas Gerulaitis), leur présence pour remonter le moral des troupes (et leur taux d’alcoolémie) entre deux parties sera primordiale. Ils seront assistés par Gustavo Kuerten pour la partie diurne des hostilités.

Le président du fan-club : Mark Philippoussis. Celui dont les (nombreuses) conquêtes amoureuses ont eu pour noms Silvana Lovin, Jennifer Esposito, Shannon Elizabeth, Paris Hilton, Delta Goodrem, Anna Kournikova, Tara Reid et Siobhan Parekh se chargera de séduire de nouveaux supporters, assisté de Marat Safin lorsque sa gu… sa récupération après un jour de repos bien arrosé le lui permettra.

L’animateur des pauses jeux vidéo : Gaël Monfils, dont les apparitions en direct sur Twitch sont en général aussi longues et dépourvues de fil rouge que ses performances sur le court. Comme notre apprenti gamer n’a pas encore totalement récupéré de sa blessure contractée au cours de sa préparation foncière (sur console) pour la saison 2021 d’e-sport, sa présence sur le terrain restera virtuelle.

© Art Seitz

Les gardiens

Diego Schwartzman. Mais non, on déconne. D’ailleurs on vous voit venir avec Ivo Karlovic ou John Isner. Que nenni ! Daniil Medvedev défendra la cage de notre Courts FC. La momie de Flushing Meadows, qui avait rallié la finale sur une jambe et à grand renfort de bandelettes en 2019, fait non seulement 1,98 m (ce qu’on a tendance à oublier), mais est également doté du déplacement félin de Miloslav Mecir. Idéal sur une ligne de fond de court… ou de but. Sa tâche ne différera que peu de celle qui est la sienne au quotidien : éviter qu’un objet circulaire termine sa course dans un filet. Il sera suppléé, le cas échéant, par Mats Wilander, dont le jeu de limage intensif en fond de court a été jugé trop défensif pour le poste de libéro.

 

La défense

Novak Djokovic – Andy Murray – Rafael Nadal –Alex de Minaur. Qui d’autre que le Big Three de la sape du mental adverse pour forcer les offensives à jouer le coup de trop ? Le no 1 mondial serbe a d’ailleurs passé une bonne partie de l’année à… se défendre. Entre les accusations de complotisme, de superspreader pour son Adria Tour, de putsch en sa qualité de président du conseil des joueurs, de tentative d’assassinat d’une juge de ligne à l’US Open et de destruction de son sport pour son idée de Grands Chelems en deux sets gagnants, le Caliméro de Belgrade a quelques arguments à faire valoir en qualité d’avocat de la défense. Nos trois premiers larrons seront épaulés par un de Minaur capable de désamorcer toute tentative de frappe proposée par les artificiers d’en face.

 

Le milieu de terrain

Jordan Thompson est un premier choix limpide. La plus belle moustache du circuit fera passer le ballon en direction de ses attaquants au nez et à la barbe de ses adversaires. Le sosie de Mario et Luigi sera également fort adéquat pour colmater les brèches et autres fuites en direction du but de Medvedev. À ses côtés, Sam Querrey est le joueur furtif qu’il nous faut pour prendre de vitesse son vis-à-vis, fort de son experience rocambolesque d’évasion covido-aérienne de Saint-Pétersbourg. Reste encore à mettre la main sur notre fugitif qui aurait été filmé en train de jouer au golf en Californie alors que certains l’imaginaient déjà réfugié au Canada ou en Biélorussie. Stefanos Tsitsipas sera notre troisième homme au milieu. On ose à peine vous dire que les raisons de notre choix concernent des Tsitsipassements de jambes et des Tsitsipasses décisives, de peur de dépasser les bornes des jeux de mots douteux autorisés par la rédaction en chef du mag’.

© TieBreakTens

L’attaque

John McEnroe à gauche et Björn Borg à droite, histoire de mettre le feu aux défenses adverses et de geler leurs éventuelles contre-attaques avant même leur élaboration. Et finalement, Dustin Brown sera notre numéro 9. Celui qui ferait passer Stefan Edberg pour un joueur attentiste et Fernando Gonzalez pour un calculateur allergique à la prise de risque est évidemment l’avant-centre idéal.

 

Les remplaçants

La paire Jimmy Connors – Ilie Nastase. Pressentis pour épauler McEnroe en attaque, Jimbo et Nasty ont catégoriquement refusé de jouer si Big Mac était également titulaire. Ils seront donc chargés de chauffer le public et les adversaires depuis le banc de touche à l’aide de gestes d’anti-jeu habilement dissimulés derrière des singeries destinées à la foule en délire. Après bientôt douze mois de pandémie, quarantaines et autres huis clos, ce paragraphe est tout simplement choquant.

Casper Ruud. Le fantomatique Danois aura pour mission de traverser les défenses adverses et fera étalage de son pouvoir unique, qui lui permet de provoquer pétages de plombs, bris de chaises et abandons de ses opposants venus des antipodes. Sa transparence ne lui permettra toutefois pas de gagner ses galons de titulaire.

Feliciano Lopez. L’élégant attaquant ibère au melon aussi développé que sa patte gauche ignore toutefois l’existence du revers (lifté). Avoir dans ses rangs un joueur qui ne connaît pas la défaite est toujours pratique. « Deliciano » assurera aussi à ses coéquipiers le soutien indéfectible de Judy Murray depuis les tribunes, ce qui n’est pas un avantage négligeable.

Lleyton Hewitt. L’actuel mentor d’Alex de Minaur veillera sur son poulain depuis le bord du terrain et utilisera sa voix de stentor (un attribut qui lui avait valu le titre fort prisé de sportif le moins admiré de la planète décerné par un magazine de son pays en 1999) pour se charger du cri de ralliement d’avant-match. 

Tim Henman. Pas disponible le dimanche ou les jours de finale, celui qui a trébuché à six reprises sur l’avant-dernière marche en Grand Chelem n’a pas obtenu la confiance de son entraîneur en vue d’une titularisation au-delà des matches de poule.

David Nalbandian. Celui qui est probablement le joueur le plus talentueux de l’histoire du jeu à n’avoir jamais gagné de titre du Grand Chelem sera également le membre le plus doué du Courts FC à chauffer le banc.

Patrick Rafter préfère savourer les grandes occasions loin du feu des projecteurs. Il restera comme le seul no 1 mondial à n’avoir pas disputé un match durant son règne puisqu’il ne s’était aligné nulle part pendant la toute petite semaine qu’il a passée sur le trône du tennis. Une fois sa sélection parmi nos 22 élus acquise, le gendre idéal du Queensland profitera d’un repos bien mérité.

Guillermo Vilas. Pas de bol, à cause d’une erreur de calcul, le classement de Willy ne lui a pas permis d’intégrer la liste des onze titulaires. Il est de piquet en attendant un recomptage des points qui devrait finir par montrer qu’il était passé devant Connors…

Juan Carlos Ferrero. Celui qui aurait dû gagner Roland-Garros 2002, aurait pu remporter le Masters la même année et l’US Open en 2003 et s’est retrouvé à deux doigts de terrasser Hewitt et Philippoussis en finale de Coupe Davis quelques semaines plus tard pour finalement s’incliner à chaque fois, fera ce qu’il a toujours fait : il sauvera les derniers meubles qui restent en grattant une place dans la soute de l’avion du Courts FC. À l’image de ce titre à Roland-Garros 2003, l’arbre qui cache une forêt de regrets. 

 

Article publié dans COURTS n° 10, hiver 2021.