Chris Evert
une légende d’influence
Par Ros Satar
Traduit par Christophe Thoreau
Quelles joueuses, aujourd’hui, peuvent légitimement s’inscrire dans les traces de Chris Evert, qui symbolisait à la fois élégance, grâce et une détermination de fer ? Soyons honnêtes, une poignée seulement.
Parlons sport pour commencer. Le palmarès de l’Américaine parle de lui-même: 18 titres en simple en Grand Chelem, trois en double, et une place de numéro un mondiale en fin d’année de 1975 à 1978 avant 1980 et 1981. Evert fut aussi, avec Martina Navratilova, l’une des héroïnes de la rivalité les plus durable, sinon la plus emblématique de l’histoire du jeu.
La petite Chris a commencé le tennis très tôt et a rapidement montré des dispositions exceptionnelles. A tel point qu’elle signe ses débuts en Grand Chelem à 16 ans, à l’US Open 1971. La jeune Evert était alors sur une incroyable série de 46 victoires consécutives, à la fois en juniors et en « pro », lorsqu’elle s’incline finalement contre Billie-Jean King en demi-finales.
Ce ne fut donc pas une surprise de la voir, deux ans plus tard, se hisser en finale à Roland Garros et Wimbledon. Tout comme il fut dans la logique des choses qu’elle s’y impose dès l’année suivante. Evert fut également la première numéro un mondiale du classement informatisée de la WTA, le 3 novembre 1975.
Conseil d’ami : ne commencer pas à énumérer les exploits ou les records de l’Américaine, c’est la migraine assurée. Allez, trois chiffres parmi des dizaines d’autres tout de même. Evert a atteint -au minimum- les demi-finales de 148 des 149 tournois du Grand Chelem qu’elle a disputés en seize ans de carrière. Unique ! Et que dire des 125 matches de suite sans défaite sur terre battue, une performance enregistrée entre août 1973 et mai 1979. Evert, c’était également sept titres à Roland-Garros. Un total que seul Rafael Nadal réussira à battre, en 2013.
Mais il est en revanche impossible de passer à côté de sa rivalité avec Martina Navratilova. Au milieu des années 70, époque où elle dominait le tennis féminin de la tête et des épaules, Evert avait clairement le dessus sur sa meilleure ennemie, remportant 23 de leurs 30 premiers affrontements. Mais au fil des années 1980, Navratilova a perfectionné son jeu, vers l’avant notamment, s’est endurcie physiquement, à une époque où, également, le rendement des raquettes commençait à s’améliorer. Et au terme de leurs… 80 duels, c’est Navratilova qui a terminé avec l’avantage dans ce tête-à-tête de reines : 43-37. Et 10-4 si on tient compte des seules finales du Grand Chelem.
Une « terrienne » au sang froid unique
Evert a été la joueuse de fond de court de son temps, avec une longueur de balles et un choix des zones sans pareil. Son style défensif, son impeccable jeu de jambes et sa capacité à commettre un minimum de fautes directes lui ont permis d’exercer un joug sans pareil sur son époque. Son calme et sa formidable capacité de concentration lui ont valu le surnom par les anglo-saxons de « Ice Maiden » (la dame de glace).
Et maintenant ? Cette mère de trois garçons, dont les commentaires à la télévision sont régulièrement salués, aime, par petite touche -et avec élégance forcément- apporter aux championnes d’aujourd’hui son regard forcément avisée sur leur carrière. Comme lorsqu’elle prend en 2006 l’initiative d’écrire une lettre ouverte à Serena Williams l’invitant a bien prendre conscience de « sa place dans l’histoire de ce sport ». Témoin, également, sa révérence devant une Naomi Osaka toute juste sacrée à l’US Open dans des conditions rocambolesques, ou encore son tweet à l’attention d’une Donna Vekic désemparée après une défaite en finale à Nottingham en juin dernier. Mais l’Américaine, qui fut une active présidente l’association des joueuses au sein de la WTA (de 1975 à 1976 puis de 1983 à 1991) avait déjà montré, en plein coeur de sa carrière, son intérêt pour les autres.
Avec le temps, Evert est donc devenue une main chaleureuse sur l’épaule de celles qui rêvent de lendemain qui chantent. A la fois pour celles qui n’ont plus qu’une marche ou deux à franchir pour assoir encore plus leur grandeur. Comme pour celles qui commencent tout juste à collectionner les titres Grand Chelem. Ou enfin comme celles qui, plus simplement, commencent à s’affirmer sur le circuit. Evert, l’icône qui fait l’unanimité.