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Sans Filet

Une émission qui a la cote

© Winamax

Aux antipodes du format conventionnel des médias traditionnels, dits mainstreams, l’émission Sans Filet, diffusée sur Winamax TV, apporte un véritable vent de fraîcheur dans l’horizon tennistique. Orchestré par Marie Dib Beljean accompagnée de ses fidèles acolytes, le trublion Benoît Maylin, le journaliste tout terrain Julien Pichené et l’ancien joueur professionnel Julien Varlet, le programme mêle divertissement, humour déjanté mais aussi pédagogie et information. Focus sur une émission qui est bien plus qu’un simple programme de paris sportifs.

 

Imaginez une bande de potes autour d’une table. Des discussions passionnées et passionnantes autour du tennis. Une actualité du circuit passée au crible et des conseils avisés en matière de paris sportifs. Le tout dans une ambiance chaleureuse. Ajoutez une mini table de ping-pong et des parties endiablées. Saupoudrez le tout d’un grain de folie et vous obtenez l’émission Sans Filet. « C’est du champagne tout simplement. » Une expression parmi tant d’autres, signée Benoît Maylin, pour décrire cette pièce de théâtre dont il est l’acteur principal.

© Winamax

Casser les codes du tennis

Amuseur public et pilier incontournable du programme, celui qui déteste se dire journaliste s’est fait un nom dans le petit milieu du tennis grâce à ses interventions complètement décalées. Tombé dans la marmite grâce à son idole Borg et ses souvenirs d’enfant à Roland-Garros où il « passait par les cuisines discrètement parce qu’il ne pouvait pas se payer de place »Benoît possède un parcours aussi atypique que sa personnalité décoiffante. « Je n’ai jamais suivi d’école de journalisme. Ce mot ne veut rien dire pour moi. C’est simplement être curieux et s’intéresser au fonctionnement des joueurs. Je ne suis pas un journaliste, je suis un fan », insiste-t-il.

Passé, entre autres, par ESPN Classic Sport, Eurosport ou encore Tennis Magazine, ce pur autodidacte a écumé bon nombre de médias prestigieux. Mais c’est surtout grâce à ses chroniques déjantées sur la chaîne L’Équipe TV qu’il a acquis sa renommée de troubadour du tennis. Le Monfisien, le Cannibale de Bâle (salué par Sa Majesté Federer en personne !), Tsongix, Drakulic… Avec ses nombreuses caricatures farfelues de joueurs et ses déguisements clownesques, Benoît Maylin a pris pour habitude de décortiquer le monde du tennis avec humour. Un milieu qu’il a eu la chance de découvrir de l’intérieur à une époque où les réseaux sociaux sommeillaient encore et le circuit était moins aseptisé que maintenant. « De 1997 à 2002, j’étais plus souvent sur le Tour que chez moi. Comme je faisais de la télévision, j’étais identifié et j’avais cette image de clown caricaturiste. À l’époque, on avait une relation privilégiée avec les joueurs. On pouvait discuter et sortir avec eux. Il y avait beaucoup de partage. Mes deux plus grands copains sont Marat Safin et Marc Rosset. » Deux joueurs réputés pour leur capacité à fissurer, leurs frasques sur et en dehors du court mais surtout pour une allergie commune à la langue de bois. Une caractéristique partagée et défendue bec et ongles par Benoît : « Le journalisme actuel est trop rigide. C’est trop cadré. Je n’aime absolument pas. Les gens ne veulent pas ça, ils veulent du spectacle. Je veux que ce soit festif, informatif, drôle et passionné. Pour l’instant, Sans Filet, c’est ça. Si je ne ressens plus cela, je partirai comme j’ai pu le faire lors de mes expériences professionnelles précédentes. »

 

2018 : le début de l’aventure

Depuis 2018, la vie de l’électron libre a donc pris un nouveau tournant. Grâce à un autre personnage public bien connu de la télévision, Daniel Riolo, avec qui il a noué une forte amitié en commentant des matches à la radio, Benoît a embarqué dans le navire Winamax. « Initialement, on avait appelé Daniel pour faire une émission de tennis dans la peau du consultant vedette. Mais il avait reçu l’interdiction de se lancer dans le projet parce qu’il travaillait pour RMC. Après avoir refusé l’offre, il a pensé tout de suite à moi. C’est lui qui m’a permis de rentrer dans cette famille de dingues qu’est Winamax. C’est la première boîte que je connais avec cette liberté de ton depuis l’époque de Pathé Sport », explique-t-il.

Peu de temps avant, en novembre 2017, la journaliste Marie Dib Beljean, passée notamment par Eurosport, est contactée par le site de paris en ligne qui souhaite « monter une WEB TV ». Le tennis a toujours eu une place importante dans sa famille et c’est donc tout naturellement que cette ex-15/2 chez les amatrices s’est lancée dans la présentation de cette nouvelle émission. Avec comme seule directive : « carte blanche ». C’est ainsi que le tout premier « Sans Filet » est né en janvier 2018. Un baptême du feu que redoutait Marie, découvrant pour la toute première fois le rôle d’animatrice et le déroutant Benoît par la même occasion: « Comme tous les amoureux de tennis, je connaissais Benoît via ses chroniques à l’Équipe. C’est un fort caractère et je n’avais jamais présenté d’émission avant Sans Filet, donc j’étais très angoissée à l’idée de « driver » une personnalité comme lui. » Heureusement, le binôme trouve rapidement ses automatismes, formant une complicité naturelle dès sa première apparition. «Il m’a directement mise à l’aise. Benoît c’est un peu mon mentor. J’ai commencé avec lui, j’ai tout appris avec lui. C’est un monstre de travail. Un passionné passionnant. » Un bel hommage que le principal intéressé appréciera.

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« Une équipe de Coupe Davis »

Après cette grande première plus que concluante, la petite équipe décide de s’agrandir, animée toujours par le même refrain : « plus on est de fous, plus on rit ». Expert en la matière, il ne faut que quelques minutes au théâtral Benoît pour trouver ses futurs camarades de jeu. « J’avais déjà mon équipe de Coupe Davis en tête. J’ai toujours bossé avec eux puisqu’il n’y a pas mieux au monde. Julien Varlet est le number one. On s’est connus à l’époque d’ESPN Classic à Londres où nous commentions ensemble. Si tu veux être ami avec quelqu’un sur cette planète, il faut choisir ce gars. » Derrière cette montagne de compliments se cache un ancien joueur professionnel, classé 120e mondial à son top. Apprécié de tous pour la bonhommie qui le caractérise, Julien Varlet a toujours fait l’unanimité. D’abord sur le court avec une carrière plus qu’honorable. Originaire de Cambrai, le Nordiste a disputé « une quinzaine de Grands Chelems dont le tableau final de Roland-Garros et de l’Open d’Australie ainsi qu’un quart de finale à Milan (ndlr : l’équivalent d’un ATP 500 aujourd’hui). »

Au cours de ses neuf années arpentées sur le circuit, le Frenchy a eu le privilège de croiser deux fois sur sa route le futur ogre de l’ocre, Rafael Nadal, en se payant même le luxe de lui chiper une manche sur sa surface de prédilection. « Je lui avais pris un set sur terre battue en 2003 à Aix-en-Provence alors que j’étais 165e au classement (ndlr : 5-7 6-1 6-4).» Varlet a été pendant huit ans le seul joueur hors du Top 100 à ravir un set à Rafa sur terre avant que Paolo Lorenzi n’accomplisse la même prouesse en 2011 (un exploit imité depuis par une poignée d’autres tennismen). Détenteur un temps de ce record assez unique, il était écrit d’avance que le souriant gaillard allait apporter son œil expert dans une émission tout aussi originale. « Ce qui est top à Winamax c’est qu’on a entièrement carte blanche. On se fend bien la poire tout en essayant d’apporter du sérieux et des analyses techniques. J’ai un peu le rôle du consultant tennis. J’essaye de guider au mieux les parieurs dans leurs choix avec mon expérience d’ancien joueur. »

Retraité des courts depuis 2006, Julien jongle désormais avec sa double casquette : celle de consultant pour le groupe Canal+ et une plus récente, celle de coach de jeunes talents à la French Touch Academy, basée au Cap d’Agde. Malgré son quotidien bien rempli, il parvient à agencer son emploi du temps du mieux qu’il peut pour intervenir dans Sans Filet. « Je me suis calé par rapport à mon planning avec Canal+. J’ai un certain nombre de jours et de tournois à faire avec eux. Quand je monte à Paris, j’en profite pour réintégrer l’équipe de Winamax. Ils aimeraient que je sois là plus souvent mais ce n’est pas simple », concède-t-il.

Un mal pour un bien puisque cette fréquence d’apparition ponctuelle a permis au « number two » de Benoît, un autre Julien, de tirer son épingle du jeu, d’abord dans un rôle de joker de luxe, puis désormais de chroniqueur emblématique de l’émission. « Pichené, c’est simple, il est fou. C’est le Jean-Pierre Léaud du tennis. Il est extraordinaire dans sa folie. On se complète bien mais peut-être un peu trop. » Venant de la part du diablotin Maylin, ces quelques mots en disent long sur ce joyeux drille à la culture tennis aussi riche que son vocabulaire. S’il brille par son éloquence et ses envolées lyriques, Julien Pichené ou « la Piche », de son surnom, est aussi capable de craquages légendaires. En témoigne cet énorme cri poussé en ouverture de l’émission spécial Roland-Garros du 10 juin 2021, référence à celui lâché par Djokovic, déchirant la nuit, après sa victoire contre Berrettini en quart de finale. Avec sa douce folie communicative, le show Pichené débute dès sa première intervention avec son fameux « Bonjour ! »promesse de bonne humeur. Humour et passion riment donc avec ce journaliste de formation, pris par le virus du tennis dans les années 90 devant le tournoi de Bercy. « Je ne m’intéresse pas à grand-chose mais quand je m’y intéresse, je ne fais pas semblant, j’y vais à fond », s’amuse-t-il.

Durant toute son adolescence, il sortira les vieux grimoires poussiéreux du grenier pour étudier la grande histoire de ce sport qu’il aime tant. « J’ai commencé à faire tous les tableaux, à fouiller dans les archives, à trouver de vieux magazines et à reconstituer l’histoire du tennis avec les pièces de puzzle que je parvenais à rassembler. J’ai toujours eu cette fascination pour le passé et le vintage, je voulais rattraper tout le retard que j’avais pris. » Cette passion ne le quittera plus. Parmi la dizaine d’ouvrages qu’il a écrits et co-écrits, tous (ou presque) sont empreints de cette nostalgie. Si l’écriture occupe une place importante dans sa vie, Julien Pichené maîtrise également tous les autres supports du métier de journaliste. « J’ai travaillé dans différentes radios comme Europe 1, RMC, France Info, Nostalgie… J’ai fait pas mal de télévision également puis j’ai rencontré Benoît à L’Équipe 21. Il m’a rappelé plusieurs fois autour de différents projets en rapport avec le tennis dont celui de l’émission Sans Filet il y a un an. » Le franc-parler et le grain de folie de Julien ont fait mouche dès le début. « J’ai fait ce petit test à Winamax en 2020 à la fin de Roland-Garros puis tout s’est fait naturellement. J’ai mordu à l’hameçon et ça fait un an que j’y suis et que je m’y sens bien. »

Et cela se ressent en tant que spectateur. On prend plaisir à suivre cet équipage qui ne se prend pas au sérieux. Toujours en métaphores et en images amusantes dont il a le secret, Benoît, le donneur de surnoms, est probablement celui qui décrit le mieux l’osmose naturelle qui émane du plateau. « Julien Varlet, je l’appelais Obésix au début, il détestait ça (rires). Il est cet irréductible Gaulois qui porte des menhirs. Il est indestructible et moi à côté, je suis une espèce de farfadet, une sorte d’Idéfix. Pour Pichené, j’ai eu un peu plus de mal puis je suis parti dans Tintin et Milou. C’est mon Capitaine Haddock. Le mec qui te lâche des moules à gaufre et des bachi-bouzouks à chaque fin de phrase. »

Des personnages échappés de bandes des- 

sinées que parvient à canaliser la chef d’orchestre Marie Dib Beljean, éblouissante de naturel. « Heureusement qu’elle est là pour nous calmer par moment », s’amuse Julien Varlet. En effet, sans cadre, le plateau pourrait rapidement basculer dans la cacophonie générale avec ce trio inarrêtable. Mais que nenni. Avec autant de prestance que de candeur, l’animatrice mène la danse avec brio. « C’est notre capitaine de Coupe Davis. Marie est extraordinaire là-dedans. Être cool, bon enfant, à l’écoute, redistribuer les cartes, donner la petite information qui va bien, créer une atmosphère sur un plateau… Il y a deux personnes parfaites dans ce rôle-là. Olivier Ménard et Marie Dib Beljean. C’est une personne simple qui aime son boulot. Elle n’a qu’un objectif, c’est que tout le monde ait passé un bon moment. C’est très rare », souligne Maylin, son mentor. Un magnifique hommage pour la journaliste qui se réjouit d’avoir « trouvé sa place dans cette bande bienveillante ».

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Pari gagnant

Si cette bonne humeur ambiante la résume très bien et que ses protagonistes utilisent les termes « spec-tacle » ou « divertissement » pour la décrire, Sans Filet n’en reste pas moins une émission structurée et informative. Découpé en plusieurs séquences avec notamment le traditionnel « Daily Mayl » en guise d’ouverture, narré par Benoît Maylin, qui revient sur l’actualité brûlante du circuit, le programme s’attarde sur l’examen minutieux et l’analyse pointilleuse des cotes des matches du moment. « On essaye de transmettre et d’apporter des choses intéressantes mais surtout pertinentes. L’objectif étant de faire gagner les parieurs qui nous écoutent et de les fidéliser », explique Julien Varlet. Si les messages fleuris des joueurs perdants en colère font malheureusement partie du jeu, l’ancien tennisman professionnel préfère se concentrer sur le positif : « Il y a fort heureusement des messages très chaleureux comme celui que j’ai reçu dernièrement d’une personne qui est partie en vacances en suivant mes conseils. J’essaye d’apporter modestement une certaine pertinence avec mon expérience du jeu mais je ne détiens pas la vérité. Si je l’avais, je serais déjà aux Bahamas (rires). » De son côté, l’autre Julien collectionne les messages bienveillants depuis son arrivée dans l’équipe. « Les joueurs aiment bien me partager leurs gains ou me demandent des conseils. Ils ont souvent des bonnes idées et ils font des super combos. J’essaye de leur répondre à tous dans la mesure du possible. C’est quelques dizaines de messages par semaine et plusieurs centaines sur l’année. »

Au-delà de l’aspect « paris sportifs », le programme Sans Filet, diffusé sur les plateformes Youtube, Twitch et Molotov, se présente comme le rendez-vous quotidien à ne pas manquer pour les fans de tennis. « Le rythme de fréquence de l’émission est du 5/7j sur les ATP 250 et ATP 500, 6/7j pendant les Masters 1000 et tous les jours quand c’est un Grand Chelem. C’est donc très intense ! », explique Marie Dib Beljean, fière de cette « proximité avec les viewers » qui intéragissent durant l’émission.

À des centaines de kilomètres des locaux parisiens de Winamax, Julien Varlet est également témoin de cet engouement positif dans le Sud : « On est la seule émission tennis. Il faut le souligner. Au Cap d’Agde, les gens m’ont parlé de Sans Filet lors d’une récente grosse compétition. Dans le lot, il n’y avait pas que des parieurs. Cela prouve que les gens regardent encore du tennis et que ça les fait vibrer. »

 

2022 : une nouvelle étape

Bien que néophyte dans le paysage audiovisuel tennistique, l’émission Sans Filet ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Avec son nouveau plateau XXL créé sur mesure pour cette nouvelle saison, le programme a franchi un palier supplémentaire. « Winamax nous donne la possibilité de le faire. C’est une boîte qui met des moyens énormes pour développer des projets », souligne Benoît Maylin avant de présenter d’autres concepts prévus dans un avenir proche : « Winamax va me donner la possibilité de réaliser des interviews longs formats. À l’image du film ‘ Dans la peau de John Malkovitch’, je veux rentrer dans la tête des pros. L’aspect mental, psychologique et psychique c’est ce qui m’intéresse. Je veux savoir comment ils pensent, comment ils ont grandi, comment ils abordent un match, leur carrière… Il va y avoir d’énormes surprises prochainement. » Un programme alléchant pour les aficionados de l’émission qui pourront même bientôt affronter le dieu auto-proclamé du ping-pong : Benoît Maylin. « On compte organiser une rencontre avec les fans de l’émission autour d’un tournoi de mini ping », explique Marie.

Du grand saut dans l’inconnu en janvier 2018 jusqu’à ce début de saison 2022, quatre années de rires et de débats enflammés ont jalonné le programme Sans Filet. Ce dernier a d’ailleurs franchi récemment la barre des 500 diffusions. « Est-ce que les autres émissions ont autant d’espace de liberté que nous ? Je ne suis pas sûr que tu puisses te permettre sur une chaîne un peu plus traditionnelle de dire que tu viens de voir un match de merde ou que tu ne peux pas blairer tel joueur… À la télévision, ils sont un peu en pilotage automatique, c’est formel. Ce n’est pas du tout leur faute, c’est juste que c’est le format des médias mainstreams qui veut cela. C’est très bien, qu’ils continuent à être conventionnels, on paraît originaux comme ça à côté (rires) ! », conclut Julien Pichené.

À la manière du journaliste sportif, il convient de ne pas comparer et confronter ces deux formats que tout oppose. Au contraire, ils se complètent à merveille et permettent d’avoir une vision d’ensemble sur la planète tennis. En résumé, Sans Filet offre une voie alternative en sortant des sentiers battus. Pas d’innovation sans prise de risque. Pas d’originalité sans chroniqueur déjanté et puis surtout, pas de tennis Sans Filet ! 

 

Article publié dans COURTS n° 12, printemps 2022.

« Elles sont vertes. Elles sont jaunes. »

Les gens sont aussi certains de la couleur des balles de tennis que du crocodile ou bien de l’alligator sur la chemise Lacoste. L’ambivalence n’est pas à craindre ; la plupart des gens connaissent la réponse de manière définitive. Vous, qui lisez ces lignes, avez probablement pris position d’un côté du grand fossé des couleurs des balles de tennis et vous vous demandez comment quelqu’un peut penser autrement que vous.

Roger Federer dit « jaune ». (Certains d’entre vous ont réagi à cette information par un « Mais, bien sûr ». D’autres avec un incrédule « Whaaaa-t ? ») 

Le débat commence. Et ainsi commence le parcours des plaisirs qui constituent le miracle de la vision.

L’un des mouvements artistiques les plus importants du siècle dernier est connu sous le nom d’« art cinétique ». Il s’agit d’œuvres relevant de la catégorie générale de la « sculpture » où le spectateur perçoit un mouvement actif et où le mouvement est un élément essentiel de ce que nous voyons. Les praticiens les plus connus sont Alexander Calder et Jean Tinguely. Pour le premier, il faut le souffle d’un ventilateur ou un coup de vent pour initier le mouvement ; pour le second, il faut appuyer sur un bouton ou tourner un interrupteur pour mettre la machinerie en mouvement. L’expérience du spectateur consiste à voir de petites formes – certaines ressemblant grossièrement à des feuilles, d’autres à des bras – qui vont dans un sens et dans l’autre, d’abord dans une direction puis dans une autre, avec un élément immobile plus stable et fixe qui ne va nulle part.

Il existe peu de meilleurs exemples d’art cinétique qu’une partie de tennis, qu’elle soit vue de l’intérieur par les joueurs ou de l’extérieur par les observateurs. La toile, pour ainsi dire, est fixe. La couleur de fond est soit le magnifique rouge terre cuite de la terre battue, soit le vert foncé poussiéreux spécifique du gazon, soit la teinte plus claire et plus plate d’une surface synthétique. Les subdivisions, avec leur géométrie fixe, sont blanches. Comme le contour du court dans son ensemble, les éléments de cette structure parfaitement tracée d’horizontales et de verticales – avec ces longs couloirs étroits pour les doubles et les carrés de service précisément délimités – sont d’une largeur constante dans ce blanc très particulier, presque toujours le même, qu’il soit sur bandes, roulé à la chaux ou peint. Il ne s’agit pas de la teinte brillante des publicités pour le blanchiment des dents, mais d’une teinte légèrement mate, bien que distincte et évocatrice de clarté. Il n’y a pas d’absurdité à ce sujet, mais, tout de même, ce blanc, à l’analyse, pourrait montrer juste un soupçon de teinte, invisible mais tout de même légèrement nuancée. 

Mais les parties de ce chef-d’œuvre cinétique qui bougent sont, dans leurs couleurs, tout à fait différentes. Les balles, les raquettes, les joueurs : la danse des néons commence. Des vêtements blancs comme la neige ou fluorescents comme le jour, des peaux et des cheveux de toutes les couleurs, des raquettes qui, autrefois, avaient l’élégante couleur du bois verni et qui, aujourd’hui, sont, comme les skis modernes, un amalgame insistant de rouges et de jaunes pulsés, avec parfois de l’argent ou de l’or scintillant : tout cela est en perpétuel mouvement. Et il y a un petit élément brillant, qui se déplace plus loin et plus rapidement que tous les autres, par-dessus le filet et en sens inverse, toujours de la même taille et toujours de la même couleur vive : la balle. Mais quelqu’un pourrait-il dire : est-elle jaune ou verte ?

Est-ce important ? Le langage verbal n’est-il pas secondaire par rapport à l’action et à l’expérience ? Pourquoi cette insistance sur l’étiquetage ?

Petite confession : pendant un demi-siècle, j’ai travaillé avec l’art de Josef Albers, la plupart du temps en dirigeant une fondation à but non lucratif qu’il avait créée avec sa femme Anni, la brillante artiste textile et graveuse. Josef était un éminent théoricien de la couleur, fasciné par le langage et la fonction de la couleur. Il avait coutume de dire que « la couleur est le médium le plus relatif de l’art ». Dans son enseignement, ses écrits et sa peinture, il a démontré, avec une passion et un plaisir extrêmes, la façon dont nous voyons une couleur non pas tant par elle-même que par rapport à ses voisines. Ce qui compte dans cette couleur de balle, c’est ce qui lui arrive par contraste avec la surface du terrain, comment elle réagit à la lumière vive du soleil ou au crépuscule du soir, comment elle interagit avec la teinte de la surface du terrain. La couleur de la balle est un absolu, mais notre expérience de cette couleur est multidimensionnelle. Ce n’est là qu’un des miracles qui se produisent dans le processus du jeu de tennis.

La raison pour laquelle la couleur actuelle est utilisée pour les balles de tennis est liée à de simples questions de visibilité. Les balles de tennis étaient autrefois blanches – du moins pour la plupart – jusqu’à ce que David Attenborough, le naturaliste et présentateur de télévision, devienne contrôleur pour BBC 2. En 1967, Sir David a obtenu la permission pour BBC 2 de commencer à diffuser en couleur. La première fois que Wimbledon est télévisé en couleur plutôt qu’en noir et blanc, on remarque que les balles de tennis blanches sont difficiles à voir. Il y avait moins de contraste entre la balle blanche et les lignes blanches lorsqu’il y avait une panoplie de couleurs dans l’environnement que lorsqu’il n’y avait que du noir et blanc (un point que Josef aurait trouvé absolument fascinant. L’idée que le passage des couleurs environnantes au spectre complet de l’échelle blanc-gris-noir rendait les balles blanches moins visibles était le genre de phénomène qui le ravissait). Sir David eut l’idée qu’il fallait essayer autre chose. En 1972, les balles de tennis colorées étaient approuvées par la Fédération internationale de tennis.

Et le nom de la couleur, écrit en gras sur les boîtes de balles fabriquées par la société Wilson, était…

 Jaune Optique.

Pour être plus précis, la couleur, telle que spécifiée par l’ITF, est, selon le code de couleur Hex, dfff4f. Sur l’encyclopédie des couleurs en ligne développée plus récemment et appelée ColorHexa, cette couleur est devenue ccff00. Un autre système de codage des couleurs, RGB, le rend RGB 223 255 79. Le système de codage hexagonal utilise des lettres et des chiffres qui indiquent les proportions de rouge, de vert et de bleu dans une couleur ; le code RVB est une manière différente de calculer les mêmes quantités relatives dans un mélange. 

Alors, qu’est-ce que cela nous dit ? Color Hexa décrit ccff00 – la couleur d’une balle de tennis –  comme « jaune fluorescent ou lime électrique ». Dans le système RVB, elle fait partie des verts. 

Hommage au carré : Rare Diversion,
1969
Huile sur isorel,
60.9 x 60.9 cm 

Hommage au carré : Nouvelle Pâture,
1961
Huile sur isorel,
60.9 x 60.9 cm 

Hommage au carré : Nulle Part,
1964
Huile sur isorel,
60.9 x 60.9 cm 

Hommage au Carré : Nulle Part,
1964
Huile et gouache
sur carton,
35.3 x 18 cm

« Electric lime ! » Souscrivez-vous à l’idée que les citrons verts ont précédé les citrons, et que les citrons sont un hybride de citrons et de citrons verts, même si les citrons poussent sous des climats plus doux que les climats tropicaux et semi-tropicaux exigés par les citrons verts ? En tout cas, en supposant que nous soyons tous d’accord sur le fait que les citrons sont jaunes, une seule couleur peut-elle être l’équivalent à la fois des citrons verts et des citrons, même si l’un est fluorescent et l’autre électrique ? Pourquoi n’y a-t-il pas une seule réponse à la question sur les balles de tennis ? Qu’en est-il de la couleur de ces agrumes que vous voyez au supermarché, qui ont la forme d’un petit citron ou d’un gros citron vert, et qui sont ce que nous appelons « jaunes » avec des touches de ce que nous appelons « vert » ? Leur goût fait-il écho aux pourcentages de leurs couleurs, à mi-chemin entre les deux types de fruits ? ont-ils cette note aiguë qui distingue un gimlet accentuant cette saveur plus ronde qui caractérise la limonade ? 

La solution consiste à accepter le mystère, à reconnaître les limites des mots. N’essayons même pas de dire de quelle couleur est une balle de tennis ; l’étiquette, après tout, a suivi le développement de cette teinte particulière. Le langage ne vient qu’après, bien sûr ; le soleil et les champs arboraient déjà leurs couleurs avant qu’il n’y ait des noms pour ces teintes et que les mots pour les identifier apparaissent. Le visuel a précédé le verbal, et dans les deux cas, nous devons accepter la beauté des aléas ; chercher la précision, c’est manquer la cible. Josef Albers – qui vivait à Orange, dans le Connecticut – se réjouissait de la présence d’un panneau d’autoroute à la frontière de la ville, peint dans la couleur verte très particulière requise pour ce type de panneau, et qui indiquait, en caractères blancs et gras, « This is Orange ». Où est la vérité ?

Jetons un coup d’œil à la couleur la plus proche de celle des balles de tennis dans l’art d’Albers :

Josef était très conscient que différents fabricants utilisaient le même nom pour des couleurs qui semblent très différentes. Un jaune Mars de Winsor & Newton, par exemple, semble très éloigné d’un jaune Mars de Grumbacher. En outre, l’aspect d’une couleur lorsqu’elle est reproduite est différent de celui qu’elle a sur une toile peinte. 

Testez votre mémoire des couleurs. Dans ces tableaux d’Albers, laquelle de ces couleurs ressemble le plus à une balle de tennis ? 

Ces trois tableaux et demi font tous partie de la série de Josef intitulée « Homages to the Square », qui comporte près de trois mille toiles, peintes entre le moment où il a eu soixante-deux ans, en 1950, et sa mort à l’âge de quatre-vingt-huit ans, en 1976. Ils ont permis à Josef de créer une vaste gamme de « climats de couleur » et de susciter diverses sensations de mouvement dans des couleurs qui étaient en fait inertes. La même lumière vert cinabre, élaborée par le fabricant de peinture Old Holland, a un aspect différent selon sa quantité – et donc sa taille par rapport aux couleurs qui lui sont adjacentes – et selon l’intensité lumineuse et la teinte des couleurs qui l’entourent. Si vous prenez un morceau de papier blanc et que vous le pliez de manière à ce qu’il bloque tout ce qui se trouve entre deux des carrés centraux des tableaux, vous verrez qu’ils sont presque exactement les mêmes, bien qu’ils aient l’air très différents. (Les variables qui existent sont dues au fait que nous avons affaire à une reproduction photographique, et non aux véritables tableaux).

En matière de couleur, tout fait la différence, il n’y a pas d’absolu. Et dans le cas de la couleur des balles de tennis, il y a encore un autre élément – au-delà de la distance à laquelle nous voyons la balle, du degré d’ensoleillement ou d’ombre, de la couleur du court qui lui sert d’arrière-plan, et de la nature de notre propre vue : l’étendue de notre capacité à distinguer les couleurs. C’est l’âge et l’état de la balle.

L’artiste Eddie Martinez l’a souligné dans un récent article du New York Times :

« Je peins des balles de tennis depuis au moins cinq ans. Je ne pense pas avoir jamais peint la couleur avec précision. C’est une couleur funky. Il y a tout un débat sur la couleur des balles de tennis. Sont-elles jaunes ou vertes ? Je pense que chaque balle de tennis change de couleur au cours de sa vie. Elles commencent par être fluo, comme une boue toxique, mais une fois qu’une balle commence à perdre son duvet et à ramasser les résidus de la surface sur laquelle vous jouez, elles deviennent ternes. Je dirais qu’elles commencent par être vert fluo et vont vers le jaune avec le temps. »

Peut-être que les couleurs sont comme le mot « couleur », qui s’écrit différemment en anglais américain et en anglais ; il n’y a pas de loi fixe unique. La différence entre les citrons et les citrons verts est-elle une question de goût ou de saveur ? 

Exaltez-vous de ce que vous ne pouvez pas savoir ! Oui, il fut un temps où la couleur des balles de tennis était le blanc du gâteau à la noix de coco (ou le blanc du gâteau des anges, ou une génoise ; cela dépend de l’état de la balle). Puis, grâce à David Attenborough, elle a été rendue plus facile à percevoir par l’œil. Mais laissons le débat « vert ou jaune ? » de côté ; jetons-le hors du terrain. On ne sait jamais avec certitude qui va gagner le match, et dans ce cas, le gagnant est la couleur elle-même, pas son nom.

Et puis regardez la gravure ci-dessous de Josef Albers. Il l’a réalisée en 1969. Est-ce là que les fabricants des nouvelles balles de tennis ont eu leur idée ? Tout ce dont nous sommes sûrs, c’est que si nous fixons la couleur centrale – peu importe son nom – pendant assez longtemps, et que nous regardons ensuite l’un ou l’autre des gris qui l’entourent (gris chaud, gris froid, mais gris quand même), nous commençons à avoir de légères images rémanentes de la couleur centrale. Savourez le frisson, ou savourez-le ; les mots ne sont que des mots.  

ADV,
1969
Impression sérigraphique,
54.6 x 54.6 cm 

Article publié dans COURTS n° 12, printemps 2022.

Voyage au centre de la terre

© Brett Gradel

Théâtre du premier gros rendez-vous de la saison sur ocre, le Rolex Monte-Carlo Masters est une étape attendue et incontournable dans le calendrier. À quatre mois du lancement de la 115e édition du tournoi, le prestigieux Monte-Carlo Country Club nous a ouvert les portes de son paradis terrestre lors de l’intersaison en décembre. Sous son doux soleil hivernal, le MCCC vit au rythme des balles échangées entre ses adhérents et des semelles crissantes de plusieurs stars du circuit, venues répéter leurs gammes avant de s’envoler pour Melbourne. Immersion sur le Rocher et ses relations privilégiées avec l’ATP, où modernité et tradition se confondent depuis plus d’un siècle.

 

Tous les aficionados de la balle jaune qui ont eu la chance de se rendre en Principauté pour y découvrir le Masters 1000 de Monaco vous diront la même chose. Ce tournoi est définitivement à part. Bien gardé derrière les murailles de pierre qui l’entourent, le cadre idyllique du Monte-Carlo Country Club se découvre. Nichées au pied du Rocher, où il n’est pas rare d’apercevoir des parapentes virevolter depuis les tribunes, les terres battues rougeoyantes du MCCC sont bordées par le bleu céruléen de la Méditerranée. Le tout sous les rayons du soleil ardent de la Côte d’Azur. Bref, un véritable jardin d’Eden tennistique planté au beau milieu de la French Riviera. « Je me souviens d’une anecdote amusante partagée avec le directeur de Wimbledon qui a pour habitude de venir assister au tournoi. Si je lui reconnaissais bien volontiers que son Grand Chelem était le temple du tennis, je lui disais qu’il ne pouvait pas avoir le Queen Mary 2 (ndlr : un célèbre paquebot de 345m de long) à seulement quelques centaines de mètres du club ! », raconte entre deux éclats de rire Alain Manigley. 

© Franck Follet

La S.M.E.T.T. : la société derrière le succès du Rolex Monte-Carlo Masters 

Président de la S.M.E.T.T. depuis 2005, (la Société Monégasque pour l’Exploitation du Tournoi de Tennis), il dirige l’entreprise qui s’occupe d’organiser le Masters 1000 de Monaco : « Nous avons une petite activité en Principauté où l’on s’occupe notamment du tirage au sort du tournoi, d’exhibitions, d’événements promotionnels comme le traditionnel gala de la Grande Nuit du Tennis qui se déroule dans la Salle des Etoiles du Sporting Monte-Carlo. Il y a un tas de manifestations de ce genre mais le volume principal de notre activité se situe à Roquebrune sur les terrains du Country Club », détaille le patron de la société. Et comme le rappelle si bien celui qui est « presque né ici », les deux entités composent main dans la main pour proposer le meilleur des accueils et des rendez-vous à ses acteurs. « Notre société est en charge de tout ce qui touche au marketing et au sponsoring. Tout ce qui était impossible à assumer pour une association. Ce qui n’empêche pas cette dernière d’être collaboratrice de la S.M.E.T.T. sur le plan technique ainsi que pour l’entretien des courts. Nos 21 terres battues sont refaites fréquemment avec le plus grand soin. » 

Les plus fins observateurs l’auront remarqué en se baladant dans les allées du site de 35 000 m2. L’éclat de l’ocre monégasque est rigoureusement identique à celui de la Porte d’Auteuil. Une qualité 100 % Grand Chelem acquise grâce au travail de fourmi des agents d’entretien du club, sans cesse sur le qui-vive. Autre particularité qui contribue grandement au charme de l’événement, la facilité d’accès aux courts d’entraînements ainsi que leur extrême proximité entre eux. Les joueurs de tennis seraient-ils relégués au rang de banals individus au pays du tapis rouge et des célébrités ? Difficile à dire mais toujours est-il qu’il est parfaitement normal à Monaco de jongler avec le coup droit bestial de Rafael Nadal sur le 7, son terrain fétiche, et un Novak Djokovic décontracté répétant ses gammes de revers sur le court voisin, pendant que le reste du Top 10 règle la mire à seulement quelques mètres de là. Le tout avec une vue imprenable et dégagée sur toutes ces stars. Une situation qui relèverait du plus grand des fantasmes à Roland-Garros où la moindre apparition d’un top player entraîne de véritables émeutes dans les travées. 

 

À la fois club et tournoi : les deux facettes du MCCC 

Dans les années 60, Željko Franulović était un de ces joueurs. 5e mondial à son top, le Yougoslave, quand cette nation existait encore, avait fait vibrer le public parisien en 1970 en atteignant la finale contre le Tchécoslovaque Jan Kodeš (défaite 6-2 6-4 6-0). « À cette période, j’ai commencé à obtenir des bons résultats en me frottant à plusieurs légendes du circuit comme Rod Laver, John Newcombe ou Tony Roche », se remémore le vétéran au revers à une main toujours aussi élégant. Quelques mois avant son magnifique parcours Porte d’Auteuil, le spécialiste de la terre s’était illustré sur le Rocher en remportant le tournoi, avant d’en devenir le directeur quatre décennies plus tard : « Après quelques années passées au sein du management de l’ATP, j’ai repris le leadership du Masters 1000 de Monte-Carlo en 2005. » 

Avec une affluence moyenne de « 135 000 spectateurs » et une année record enregistrée en 2017 pour la Décima de Rafa Nadal, le rendez-vous monégasque connaît un franc succès depuis sa création en 1928. À seulement dix kilomètres de la première bourgade italienne, le tournoi est envahi le temps d’une semaine par une armada de Transalpins. Où que vous soyez, des gradins du Court Rainier III à ceux du Court des Princes, particulièrement apprécié des puristes, en passant par les travées du complexe, cette touche de Commedia dell’arte parfume l’atmosphère de ce Masters 1000 pas comme les autres. Pour le plus grand plaisir de son plus fidèle représentant, le théâtral Fabio Fognini, dont l’applaudimètre à Monaco est identique à celui de son roi Rafael Nadal. « J’ai souvent dit que j’avais l’impression de jouer ici comme si j’étais à domicile étant donné que nous sommes très proches de l’Italie. C’est aussi l’occasion de voir ma famille et mes amis qui ne voyagent pas le reste de l’année », avait lâché le voisin du Monte-Carlo Country Club (Fabio est né à Sanremo, à seulement une heure de route du MCCC qu’il connaît par cœur depuis son adolescence), lors du tirage au sort de l’édition 2020. L’année précédente, le fantasque Italien levait les yeux au ciel, hilare, en remportant le plus gros trophée de sa carrière face à Dušan Lajović dans un central en fusion aux airs de San Siro. 

Bijou d’esthétisme, le Court Rainier III fait partie des enceintes les plus majestueuses de la planète tennis. Avec sa capacité de 10 000 places et ses quatre tribunes étendues, le stade offre une vue sans égale sur les stars du circuit et sur l’onde argentée de la Méditerranée qui se reflète derrière eux. Mais pour obtenir un résultat aussi somptueux, cette configuration particulière demande une sacrée prouesse architecturale en amont. « La compétition se déroule dans un club de tennis, d’où la nécessité de le transformer en peu de temps en site d’un des plus prestigieux Masters 1000 du circuit. Nos équipes commencent donc les travaux de cette métamorphose à peu près deux mois et demi avant le début du tournoi en montant les tribunes de divers courts et en construisant une multitude d’espaces dédiés à nos joueurs, sponsors, médias et visiteurs (villages VIP et public, restaurants, zones d’animations pour les enfants, etc.) », explique Željko Franulović avant que son associé Alain Manigley ne surenchérisse : « Parmi les grands tournois du monde, nous sommes les seuls avec Wimbledon à être un club qui abrite un grand événement tennis. C’est une spécificité rare. » Une singularité, parmi tant d’autres, qui fait du Rolex Monte-Carlo Masters « the place to be » pour tous les passionnés de tennis au mois d’avril.

© Antoine Couvercelle

Un club de tennis (presque) comme les autres 

Quelques mois avant de devenir l’épicentre de la planète tennis et d’inaugurer la saison sur terre battue, le même écrin est à peine reconnaissable dans sa forme traditionnelle. Tapis dans l’ombre du village publicitaire et des différentes tribunes lors de la dizaine monégasque, les terrains cachés du Monte-Carlo Country Club se dévoilent sous la douceur du mois de décembre. Entouré par les imposantes tribunes latérales, Italie et Monaco, durant le mois d’avril, le Court Central partage son emplacement de choix le reste de l’année avec deux autres terres battues. D’ailleurs, sur l’une d’entre elles se dessine une silhouette bien connue du tennis français. Celle de Virginie Razzano. Retraitée des courts depuis 2018, la Dijonnaise a vite renoué avec ces derniers en enfilant la casquette d’entraîneuse pour sa reconversion. Forte de son expérience d’ancienne 16e joueuse mondiale, Virginie fait partie des huit moniteurs et professeurs de tennis du MCCC. Ce jour-là, elle dispense un cours individuel à l’un des 2067 licenciés de l’association. 

« On connaît le club par le prisme de son événement phare et prestigieux, le Rolex Monte-Carlo Masters, mais il ne faut pas oublier que c’est avant tout un club de tennis comme les autres, avec des structures de pratique conçues pour le bien-être des joueurs », rappelle son directeur Eric Seigle. Classé -4/6 à 18 ans, le Niçois de naissance a fait ses classes aux États-Unis dans une université en Californie pour parfaire son bagage tennistique et professionnel : « J’étais un des premiers joueurs français négatifs à partir aux USA. C’était novateur à l’époque, cela n’existait pas. » De retour de son périple chez l’Oncle Sam avec un double diplôme en poche, Eric Seigle travaille d’abord sur Nice avant de saisir une opportunité en or qui se présente à lui : « J’ai été recruté par le Monte-Carlo Country Club en 1998. J’ai été d’abord attaché de direction, directeur-adjoint puis enfin directeur principal. » Depuis 2018, celui qui a succédé à Francis Truchi, l’ancien maître emblématique des lieux, tient les rênes d’un Country Club dont la vie est bien plus riche qu’il n’y paraît. « Notre club est similaire en tous points à n’importe quelle autre association en France. Nos adhérents sont licenciés à la FFT ainsi qu’à la fédération monégasque. Nous avons une école de tennis le mercredi avec une section tennis et une section tennis multiactivités. Tout cela regroupe environ 200 enfants. » Pour les plus motivés d’entre eux ainsi que les moins jeunes, un traditionnel tournoi intermembres en simple et en double est organisé « entre mai et septembre ». En plus de cette compétition amicale, le MCCC abrite également deux épreuves officielles amateurs, l’une au mois de juillet, « un Open junior qui rassemble 350 participants entre 9 et 16 ans », et l’autre au mois d’août « limitée aux troisièmes séries » qui comporte autant d’inscrits. Sur le volet compétition, le club monégasque est aussi présent sur tous les fronts comme le souligne Eric Seigle : « Que ce soit chez les messieurs ou bien les dames, on participe aux championnats par équipe en Seniors Plus. Nous avons aussi une équipe masculine engagée en Nationale 1 ainsi qu’une équipe féminine en Nationale 3. »

Si le MCCC est bien représenté dans les sphères du tennis amateur, il est également le berceau de plusieurs compétitions mondiales dans l’ombre de son Masters 1000. « Depuis octobre 2021, la Fédération monégasque de tennis organise au Country le Tennis Europe Junior Masters qui rassemble les huit meilleurs joueurs du circuit, garçons et filles, de moins de 14 ans et de moins de 16 ans. Enfin, nous allons accueillir également une épreuve de Coupe Davis au mois de mars », précise le directeur du club presque centenaire. 

 

Un patrimoine historique légendaire 

Il est d’ailleurs l’heure de poursuivre la visite guidée de ce dernier. Toujours bercé par cette quiétude hivernale, il est tentant de profiter du panorama à la table du restaurant « Le Club House » qui longe le chemin principal. Quelques mets raffinés plus tard, la promenade peut reprendre en direction d’un autre endroit incontournable du complexe. Placardé sur un pan entier de mur, le grand tableau du tournoi qui retrace l’édition précédente est impossible à rater. Inscrit en lettres dorées, le nom de Stefanos Tsitsipas, couronné en 2021, est désormais lié à jamais à l’histoire de Monaco. En remportant ici le premier Masters 1000 de sa carrière, le Grec a rejoint le panthéon des légendes qui se sont imposées sur le Rocher. Ilie Năstase et son triplé de 1971 à 1973, le doublé de Björn Borg en 1979 et 1980 et celui de Guillermo Vilas les deux années suivantes… Bref, un palmarès XXL qu’une des façades du club-house énumère par ses gravures. 

Ce souffle du passé est une des composantes principales de l’architecture des lieux. Et c’est au premier étage du bâtiment qu’il est le mieux conservé. En effet, c’est ici que l’on retrouve les vestiaires dames et messieurs qui n’ont pas bougé d’un iota depuis la construction de l’édifice en 1928. Le bois orne toujours les casiers encore étiquetés des joueurs de jadis. Tout un symbole pour ce temple du tennis qui porte un héritage historique aussi grand que les champions qu’il a vus naître. 

« C’est un tournoi de longue date qui remonte à 1897 pour sa première édition », se remémore Alain Manigley qui est aussi secrétaire général du Monte-Carlo Country Club. Avant cela, le « Lawn Tennis de Monte-Carlo », le tout premier club de la Principauté, a été inauguré sur les caves de l’Hôtel de Paris en 1893. Après un premier déménagement en 1905, le club change à nouveau d’adresse seize ans plus tard en raison de l’expansion urbaine et immobilière de la ville. « Il a été déplacé à Beausoleil au-dessus d’un garage automobile doté de trois courts. Il portait le nom de la Festa Country Club », conte l’encyclopédie du tennis monégasque avant de continuer son récit : « On y a vu Suzanne Lenglen et de nombreux autres champions de l’époque s’y succéder. » 

Avec son style inimitable sur le court, la « Divine » séduira un riche mécène américain, George Pierce Butler, passionné de tennis. À tel point que le milliardaire jugera le Club de la Festa indigne de son talent : « ll lui faudrait un écrin à la hauteur de son statut de star et non pas le simple toit d’un garage », lâche-t-il à l’époque. « Il était en profonde admiration devant Lenglen. C’est pourquoi il a décidé, en convainquant les autorités de la ville, de créer un grand club prestigieux doté d’un environnement magnifique », explique Alain Manigley. C’est ainsi que le Monte-Carlo Country Club a vu le jour en 1928, inauguré en grande pompe par Son Altesse Sérénissime le Prince Louis II de Monaco. 

Quelques décennies plus tard, la fille Butler, Gloria, reprend dans les années 70 l’œuvre débutée par son père. « Elle est parvenue à préserver ce club malgré l’érosion du temps. Grâce à elle, celui-ci a pu survivre et mieux encore, il n’a cessé d’évoluer et de rayonner », souligne le président de la S.M.E.T.T. 

En 1972, à la demande de S.A.S le Prince Rainier III, la Princesse Antoinette accepte de prendre la présidence du club et sa fille la Baronne Elizabeth-Ann de Massy la vice-présidence. Jusqu’à son dernier souffle en juin 2020, celle-ci se sera donnée corps et âme au développement de ce joyau tennistique. « C’est elle qui m’a fait rentrer dans le comité de direction du club. Nous étions très proches. Elle a été présidente pendant 40 ans au Country. Elle y a consacré sa vie pour en faire quelque chose de magnifique. Je lui rends cet hommage parce que c’est grâce à elle que nous en sommes là », conclut Alain Manigley. 

© Antoine Couvercelle

L’adresse prisée des pros lors de l’intersaison 

Si l’héritage que la baronne de Massy a laissé derrière elle fait le bonheur des adhérents du MCCC, il est également un bien précieux pour les stars du circuit. C’est un secret de Polichinelle, Monaco est le lieu de résidence prisé des tennismen. Parmi les membres du Top 10, huit ont choisi le Rocher pour poser leurs valises. Paradis fiscal, décor de carte postale, conditions météo au top… Vivre en Principauté présente de multiples avantages. S’ils passent la majeure partie de l’année à arpenter les quatre coins du monde, les champions aiment s’octroyer une parenthèse bien méritée lors de l’intersaison en profitant des infrastructures dernier cri du Monte-Carlo Country Club. Ainsi, ceux qui auront la chance d’être sur place pendant le mois de décembre pourront croiser dans les allées Alexander Zverev juché sur sa trottinette électrique ou encore un Grigor Dimitrov à la cool, attablé au restaurant du club après une session d’entraînement. 

Si l’atmosphère qui se fait ressentir est donc moins intense qu’un cinquième set en Grand Chelem, il ne faut toutefois pas croire que les joueurs sont là pour se la couler douce. Tout au fond du Country Club, ils perdent des litres de sueur sur les deux uniques courts en dur du complexe. « On les refait de manière fréquente. On essaye de proposer des terrains avec une qualité semblable à ce qu’ils peuvent retrouver sur le circuit, que ce soit aux États-Unis ou en Australie », explique Eric Seigle. 

En effet, ces joueurs résidents ont pris pour habitude de faire crisser leurs semelles au MCCC avant de s’envoler pour Melbourne, théâtre de la première levée du Grand Chelem. Et s’il y en a un qui n’a pas fait semblant de maltraiter la balle avant l’entame de cet exercice 2022, c’est bien Félix Auger-Aliassime. Certains diront qu’il est facile de refaire le film après le début de saison tonitruant du Canadien, épatant quart de finaliste à l’Open d’Australie et vainqueur de son tout premier titre sur le circuit à Rotterdam, mais le degré d’implication et la lourdeur des frappes du protégé de Frédéric Fontang laissaient déjà présager de belles choses. Impressionnant de puissance, le Québécois a cassé bon nombre de cordages lors de sa préparation hivernale. Félix pouvait se le permettre puisque ses cadres, comme tous ceux de ses homologues, atterrissaient à une centaine de mètres de là dans le Pro Shop, la boutique du MCCC, où les petites mains de Nawal Kawtar s’agitent à vive allure. 

Étudiante en droit la semaine à Nice, Nawal est cordeuse le week-end au prestigieux Monte-Carlo Country Club. « En tant que passionnée de tennis, j’étais une habituée des lieux et du tournoi en avril. En 2020, le club recherchait quelqu’un, donc c’est tout naturellement que j’ai postulé et j’ai eu la chance d’être prise », raconte-t-elle, sourire aux lèvres, tout en achevant les derniers nœuds de la raquette d’Alexander Zverev, venu un peu plus tôt dans la journée. Sasha, Félix, Grigor ou même Novak… Tous vont la voir en personne pour lui remettre leur outil de travail. « Ma toute première raquette était celle de Djokovic. Il était venu en personne me voir avec son coach en me demandant une tension à 27 kilogrammes », explique Nawal, des étoiles encore plein les yeux, avant de poursuivre son incroyable anecdote : « J’avais l’impression de faire une opération à cœur ouvert et d’être une chirurgienne tellement j’étais stressée (rires) ! Il faut savoir que les pros sont très méticuleux avec leur matériel et qu’ils ressentent réellement la sensibilité de la tension. C’est une espèce de sixième sens qu’ils ont tous. » 

En contact régulier avec les stars du circuit, cette privilégiée mesure la chance (qu’elle a provoquée) d’exercer cette activité dans un des plus beaux clubs de la planète : « Tout le monde me dit que j’ai la plus belle vue de bureau au monde (rires) ! C’est un métier où l’on se sent utile. Et ce qui me rend aussi très fière, c’est d’être une femme dans un milieu globalement dominé par les hommes. C’est assez atypique ! »

© Laurent Van Reepinghen

Monaco et l’ATP : une histoire de longue date 

Grâce à Nawal et aux équipes du Monte-Carlo Country Club, les pros ne manquent de rien pour affiner leurs derniers réglages avant de mettre le cap vers l’hémisphère sud. « C’est une relation que nous avons avec les joueurs qui sont résidents à Monaco. On se fixe un objectif tous les mois de décembre pour leur proposer un accueil privilégié en partenariat avec l’ATP », explique Eric Seigle, le directeur du MCCC. À seulement quelques mètres de son bureau, de l’autre côté de la rue, au 74 Boulevard d’Italie, se situe le siège européen de l’Association Of Tennis Professionnals. Une adresse loin d’être anodine. « Lorsque l’ATP Tour a été créée en 1990, j’étais un ancien joueur et un organisateur de tournois. J’ai été élu membre d’un comité chargé d’agencer le nouveau circuit et le nouveau calendrier », rappelle Željko Franulović avant de préciser le sens de sa démarche : « Dans le début des années 90, j’ai été missionné pour trouver et structurer un centre administratif de l’ATP en Europe. Avec tous ses avantages à la fois géopolitiques et sportifs, nous avons rapidement choisi Monaco où je faisais partie du premier senior management de l’ATP Tour. » 

S’il est désormais aux commandes du Rolex Monte-Carlo Masters en tant que directeur depuis 2005, le Croate a participé grandement à la refonte de la grande instance du tennis professionnel. Dans son sillage, Simon Higson, responsable de la communication au sein de l’ATP, a récupéré le flambeau : « J’ai déjà une longue carrière derrière moi avec de nombreux rôles occupés à l’ATP. En 2004, j’ai passé un an à Monaco puis j’ai déménagé dans notre bureau général à Londres pendant plusieurs années avant de revenir en Principauté. » L’Anglais, qui maîtrise la langue de Molière à la perfection, rappelle que le Rocher est le carrefour idéal de la planète tennis : « L’Europe est vraiment la pierre angulaire de l’ATP Tour. Nous avons environ 40 tournois organisés sur le Vieux Continent. Le bureau a été mis en place à Monaco car c’est un point de contact stratégique qui permet de gérer les relations et de faciliter les échanges avec les tournois et les joueurs. » 

Chaque année, Simon Higson et ses collègues de l’ATP travaillent main dans la main avec le Monte-Carlo Country Club pour garantir aux stars du circuit une préparation optimale. « Nous organisons un programme d’entraînement hivernal. C’est l’une des façons de les impliquer pendant l’intersaison et de s’assurer qu’ils ont tout ce dont ils ont besoin. » Grâce aux multiples infrastructures à la pointe des alentours, les résidents de la French Riviera ne manquent de rien : « Ils s’entraînent régulièrement ensemble sur les courts du Monte-Carlo Country Club. Ils ont également à disposition le Stade Louis II pour réaliser leur préparation foncière. Pour l’aspect tennis, il y a aussi d’autres lieux de prestige dans la région comme la Mouratoglou Academy ou le Piatti Tennis Center situé à Bordighera. » 

Si l’ATP est aux petits soins de ses pensionnaires l’hiver, elle redouble également d’imagination pour faire la promotion du Masters 1000 de Monaco et de ses acteurs au mois d’avril. « Nous avions organisé une petite exhibition entre Murray et Djokovic sur la place du Casino en 2013. Nous avons eu aussi des joueurs sur des bateaux. Ces événements fournissent toujours une belle toile de fond pour promouvoir le tournoi et l’ATP Tour. C’est quelque chose que nous nous efforçons de faire année après année », souligne Simon Higson.

Selon lui, les clés de ce succès résident dans l’alchimie qui règne entre le Monte-Carlo Country Club et l’ATP depuis de longues années : « Franulović était à la tête du bureau de l’ATP avant de prendre les rênes du Rolex Monte-Carlo Masters. Il y a aussi Chris Kermode, l’ancien président de l’ATP, qui travaille maintenant comme consultant officiel pour le tournoi. Même chose pour David Massey, l’actuel co-directeur de la compétition, qui a œuvré de longues années au sein de l’ATP. Il y a un lien étroit entre les personnes qui étaient auparavant à l’ATP et maintenant au tournoi. Cette relation spéciale contribue au charme de l’épreuve. »

Acropole du tennis mondial, domaine des dieux de la balle jaune, écrin idyllique entre ciel azuréen et Méditerranée, le Monte-Carlo Country Club et son tournoi grandiose et intemporel restent un lieu mythique qui fait rêver tous les passionnés de tennis, amateurs comme professionnels, depuis presque cent ans. Dans un cadre paradisiaque, presque irréel, ses terres battues chargées d’histoire sont le théâtre séculaire de combats épiques entre Titans, Dieux, demi-dieux et simples et courageux mortels osant défier les rois de l’Olympe. 

Au-delà de ses apparences de forteresse inaccessible, de club prétendument réservé à une élite, le MCCC est un lieu étonnamment populaire, cosmopolite, où se retrouvent dans une ambiance festive et décontractée tous les amoureux et connaisseurs de tennis, dans une très grande proximité avec leurs champions. 

Dans ce Parthénon moderne, pas si éloigné de son ancêtre athénien, les simples humains ont ainsi le privilège incroyable d’approcher et côtoyer leurs dieux vénérés, seul endroit de la planète permettant cette rencontre impensable. 

 

Article publié dans COURTS n° 12, printemps 2022.

© Laurent Van Reepinghen

L’épaisseur de l’éternité

© Coco Cimino

On n’est pas tous faits du même bois. Les œuvres de Brett Gradel non plus. Son travail de marqueterie tend à faire de chacune d’elles une pièce unique. Parce qu’en créant le concept de marqueterie-fusion qui sublime le bois en le mêlant à d’autres matières et à des métaux précieux, il a réinventé une technique millénaire. Et même s’il peut lui arriver d’utiliser un même dessin pour deux œuvres, le choix de bois et de métaux différents crée une palette de couleurs et d’impressions très éloignée du travail sériel.

À bien y réfléchir, ces infimes différences dans un cadre semblable pourraient à elles seules servir de miroir au tennis. Deux joueurs, un court de dimension standardisée, l’éternelle litanie du décompte des points, une balle de couleur jaune semblable à toutes les balles du monde. Service, coup droit, revers, volée. Lift. Slice. Mais tous les courts dégagent une atmosphère distincte ; le score emprunte toujours son propre chemin ; les joueurs font de cette balle standard une balle toujours nouvelle à coups de services, de coups droits, de revers et de volées dont la technique leur appartient, à grand renfort de lift et de slice qui jamais ne tournent pareil. Variations Goldberg. Jean-Sébastien Balle.

Cet espace familier qui surprend inspire Brett Gradel au quotidien. Une question d’intemporalité que la marqueterie, un art venu de l’Antiquité qui a connu son apogée dans l’Italie renaissante, vient sublimer à travers les dessins contemporains de Brett Gradel : « J’ai l’impression que, sur un court, le temps s’arrête. Il y a une sérénité du lieu. On entend seulement le son de la balle. Soudain, on est coupé du temps : c’est ce que je recherche dans mon travail. Toutes mes créations partent de là, d’une douceur. C’est comme un rêve, un instant figé dans lequel j’aimerais vivre. »

À défaut d’exister dans cet instant figé, Brett Gradel vit sur la Côte d’Azur et on ne va pas l’en plaindre : une enfance passée sur un bateau en Méditerranée, la possibilité dans la même journée de nager, de surfer et d’aller skier en une heure de voiture, celle aussi, pas négligeable, de franchir les frontières italienne, française et monégasque en deux fois moins de temps qu’il n’en faut à Hewitt pour triompher de Baghdatis. 

« Il n’y a qu’ici où je me sente vraiment chez moi », explique Brett Gradel, qui a pourtant parcouru le monde de Majorque au Mexique en passant par la Nouvelle-Zélande et Tahiti et pas forcément dans cet ordre. D’une certaine manière, tout est affaire de textures : celle de l’eau, donc, mais aussi celle des bois avec lesquels l’artiste travaille. Brett Gradel ne peint pas sur ses œuvres : son travail de marqueterie utilise les nœuds et les teintes du bois pour créer des formes, des impressions, des motifs. Du relief. Une illusion de peinture.

© Brett Gradel

Ces textures, il les retrouve là encore sur un court de tennis : « Les terrains sont beaux. Ils dessinent des perspectives infinies avec leurs lignes blanches. Quelle que soit la surface, il y a toujours un sentiment de chaleur qui s’en dégage. Le gazon naturel, la terre battue, le bitume coloré : on se sent accueilli… Même la balle est recouverte d’une moquette chaleureuse. » 

Brett Gradel a découvert le tennis quand il était petit, grâce à son père qui continue à pratiquer tous les jours et se rend chaque année au Masters 1000 de Monte-Carlo. Sans doute Brett n’a-t-il pas le temps de l’y conduire, trop occupé à travailler dans son atelier. Par passion, il a pourtant officié comme chauffeur sur le tournoi pendant plusieurs années. Du club aux hôtels, de l’hôtel aux clubs et parfois un peu plus. C’est à cette occasion qu’il a sympathisé avec plusieurs joueurs de tout premier plan, à commencer par Marin Cilic. « Je lui ai servi de chauffeur pendant plusieurs années sur le tournoi. Il possède un appartement à Monaco, ce qui nous a rapprochés. Il a beaucoup de qualités de cœur. Et comme je l’admire aussi comme joueur, je voulais lui faire un cadeau. »

Ce cadeau, c’est Moon Ball, première incursion artistique de Brett Gradel dans le monde du tennis : un tabouret décoré d’un motif représentant une partie de tennis au crépuscule en été. Une évocation immédiate de cette langueur des matchs à la fin des vacances, quand la chaleur étouffante des longs après-midi encourageait l’enfant que j’étais à attendre la nuit pour saisir la raquette. Bordel : me voilà nostalgique.

Si je parle de moi, ce n’est pas tant par goût de la digression. D’abord parce que c’est la force de l’art que de nous propulser ailleurs, dans l’évocation des moments dont le souvenir ravive le beau ; ensuite parce que Brett Gradel et moi sommes de la même génération et que cette génération, c’est aussi celle de Cilic et de Nadal. Une génération qu’on a vue grandir sur les courts avec l’impression erronée que leur éternel statut de champion les figeait dans un âge abstrait forcément plus mûr que le nôtre. L’impression qu’ils seraient là pour toujours. Et nous aussi, sans doute, à jamais des enfants. 

© Brett Gradel
© Brett Gradel

Nadal, qui a inspiré Brett Gradel pour une autre de ses œuvres, a l’épaisseur de l’éternité. 11 Monte-Carlo, de quoi évacuer la question du vainqueur quand le tournoi commence. Est-ce aussi ça que l’artiste a voulu sculpter dans le bois, figer à tout jamais en s’attaquant à la statue du Commandeur ? La réponse de Brett Gradel est plus simple : « J’aime vraiment Nadal. Il vit et est né à Majorque et j’y ai vécu pendant deux ans. Ce qui est amusant, c’est que j’ai eu un problème de genou là-bas et je suis allé chez un kiné qui, par hasard, était aussi le kiné de Nadal. J’ai montré sa carte de visite à Rafa et il n’en revenait pas qu’un type vivant à Monaco possède la carte de son physio personnel de Majorque. Ça l’a fait beaucoup rire. » 

Plus simple la réponse, plus simple le champion. Tout Nadal est là : un plus que vingtuple vainqueur de Grand Chelem qui rigole d’un rien avec son chauffeur entre deux entraînements. Pas de quoi déplaire à Brett Gradel qui chérit cette simplicité. Son goût pour l’art en découle. Son grand-père était peintre et artisan, sa grand-mère couturière. Il a passé son enfance à leurs côtés : « J’étais toujours derrière mon grand-père, à regarder ce qu’il faisait. Il était vraiment doué pour tout ce qui était manuel. Il était un modèle. Il l’est toujours, d’ailleurs. »

La ligne n’a pas dévié. Joindre le beau et l’utile, réconcilier l’artistique et l’artisanat. Et toujours s’inscrire dans le temps long : c’est aussi le sens de la marqueterie, qui permet de créer des objets durables dans le respect de l’environnement et une logique d’éco-design. Tout ça est très nadalien, parole de pro-Federer. 

Le tabouret représentant Nadal et réalisé par Brett Gradel, que nous vous présentons en couverture de ce numéro, a un destin tout tracé : une fois signé par Rafa, il sera vendu aux enchères et l’intégralité du bénéfice sera versé à sa fondation. Inutile de dire que la démarche, celle du temps long, du don de soi, celle aussi simplement du beau, devrait plaire à Nadal. Même s’il aurait sans doute aimé profiter du tabouret pour l’entourer de ses bouteilles au changement de côté d’un set très accroché. 

 

Article publié dans COURTS n° 12, printemps 2022.

Like the Greatest Books,

the Naomi Osaka Story

Is One You Can’t Put Down

2019 © Ray Giubilo

Sat in a restaurant, celebrating her 22nd birthday, Naomi Osaka turned to her mother to ask a poignant question. 

“Did you think, by the age of 22, I would have done more? Or do you think this is acceptable?”

At that moment, Osaka was the world number one women’s tennis player. She had won two Slam titles. She would soon become the highest-paid female athlete of all time over a single 12-month period.

It’s unimaginable to the layman that this wouldn’t be enough. Most tennis players who spend years slogging around the globe, splitting their hours between hotel rooms, airport waiting lounges and practice courts, will never come close to winning a major title. For some, a foray into the top-100 – a remarkable achievement in any walk of life, albeit less celebrated in the sporting world – will be the pinnacle of their career. Others will spend a decade or more in the lower rungs, and never even qualify for a Grand Slam tournament. 

How could it be, then, that Osaka could feel this way? How could one so talented, so dedicated feel so insecure over her success? 

The insatiable thirst for glory that dominates the psyche of the greats of the sporting world paints too simplistic a picture. Osaka is a fascinatingly unique character. One incomparable to any other figure in sport. 

Her question to her Japanese mum, Tamaki – who was quick to reassure her daughter that, yes, of course, she has exceeded the wildest expectations – was captured in a newly-released three-part Netflix docuseries focused on Osaka’s rise from days spent hitting balls back and forth with her Haitian father, Leonard Francois, and older sister, Mari.

Approached by American basketball legend LeBron James’s film company, SpringHill Entertainment, Osaka signed up to work with director-producer Garrett Bradley to document, what could be described as, Chapter One of her life. 

While the sports documentary world is booming, it is unusual for an athlete as young as Osaka to be its centre point. Andy Murray, by comparison, was 32 when Resurfacing was released. However, those close to her argue that the piece should be viewed in the same cultural sphere as 19-year-old American singer Billie Eilish’s recent release, The World’s a Little Blurry. Osaka, in their view, should be perceived in a lens wider than mere athleticism.

Stylistically, Murray and Osaka’s films couldn’t be more different. Murray, perhaps more comfortable in his own skin, some 10 years Osaka’s senior, is clearly content in the camera’s presence. Osaka, by contrast, is filmed at arm’s length. While Murray is happy to let his dry, playful Scottish humour loose, offering scathing analysis of the media, and opening up about the emotional and physical trials of rehab, there are few moments where you feel close to Osaka, who is intriguingly introverted. 

However, like Murray, the moments she is most willing to let her guard down are not those filmed by a camera crew. Rather, they are in video diary format, sat talking to her mobile phone. 

Three days after failing to defend her Australian Open title in 2020, slumping to a third-round loss to Coco Gauff, Osaka grieved the tragic death of American basketball star Kobe Bryant, who had been a close friend and mentor to her.

“I felt so similar to him,” she says in her self-shot footage, before adding: “So I’m feeling like I let him down, like, I’m supposed to carry on his mentality in tennis and here I am… I haven’t won a Grand Slam. Like, I’m losing matches because I’m mentally weak… that’s so uncharacteristic of him.”

Fighting back tears, she laments a text message unsent before his death. “We’re having all these talks and I’m not even doing what we’re talking about,” she says. “So, it’s like, I’m just gonna text him again, like, ‘How do you deal with this situation?’ And then I didn’t text him that cause I didn’t wanna feel like a loser, and now I’ll never have the chance to talk to him again. I don’t know, like wow.”

While that is a rare example of raw emotion on show in the three-episode series, the context surrounding Osaka is fleshed out. 

Her career path was chosen for her. Soon after she could walk, she was taken to tennis courts to hit for eight hours a day. Almost off the cuff, she remarks, she must “become a champion or probably be broke”. 

A champion she has become. Money will now never be an issue to the Osaka clan. 

However, while clearly there is steely determination to further add to her legacy on the court, there is also a sense of desperation to expand her horizons and portfolios – best demonstrated by her exploration of the fashion world. 

It feels as though she wants to experience aspects of life that were perhaps denied to her in her family’s relentless pursuit of tennis greatness. As she herself admits, she was “a vessel” for her parents’ ambitions.

2021, AUSTRALIAN OPEN © Ray Giubilo

Still, while clearly there was an internal struggle behind the scenes – brought to life by the documentary – the Osaka story, as perceived by the wider world, has been nothing but a smooth, glorious transition to the top. 

At the start of 2021, just before filming halted, and after a broken and extended two-year spell – in large part due to the Coronavirus pandemic – Osaka won a fourth Grand Slam title at the Australian Open. 

As insiders of the Osaka camp will readily admit, there was little to no negative coverage of this multicultural superstar, who is not only a gritty champion on court but a quirky, thoughtful character off it. 

Indeed, she has been hailed for her activism, championing causes such as Black Lives Matter. In the aftermath of George Floyd’s death, she joined other sports stars in boycotting their matches in protest of police brutality. Such is her influence, the entire tennis world stopped for 24 hours. A fortnight later, she had won a second major title at Flushing Meadows, having worn, during each of her matches, masks emblazoned with the names of seven different black victims of violence in America. 

Her stock simply just continued to rise. Forbes rated Osaka’s 12-month earnings at an astonishing $60 million in 2021, smashing the women’s record she had set a year earlier. 

Heading into the French Open, the only major challenge that appeared at her doorstep was tennis-focused: would she be able to adapt her hard-court dominance to the, so far, less-successful clay and grass? 

Now, the landscape has significantly changed. A smooth sail, at least in the public eye, to become the most marketable athlete in the history of women’s sport had now entered choppy waters. Welcome to Chapter Two. 

By her own admission, Osaka’s handling of the press conference row that engulfed the French Open was clumsy, at best. Claims that written media had used the forum to “kick a person while they were down” were demonstrably untrue – particularly in relation to her own media engagements – and few on the tour supported her suggestion that the format should be changed. 

Speaking ahead of the US Open, she reflected: “There’s a lot of things that I did wrong in that moment, but I’m also the type of person that’s very in the moment. Like, whatever I feel, I’ll say it or do it. If I could go back I would say, ‘Maybe think it through a bit more.’ I didn’t know how big a deal it would become.”

To suggest Osaka was the only one in the wrong would be a total fabrication. Threats from the Grand Slams to exclude her from tournaments after refusing to partake in her media commitments were petty and heavy-handed, while those loud, rent-a-gob pundits, who attacked her character, showed an utter lack of compassion in what should have been a sensitively handled issue. 

Ultimately, the saga was tennis’s loss. Osaka withdrew from the French Open, and subsequently skipped Wimbledon to focus on her mental wellbeing. Unnecessarily, the sport was without one of its biggest stars for two of its biggest events in 2021.

© Art Seitz

She returned to court – in hindsight, perhaps prematurely, although in the context of a home Olympics, completely understandably – at Tokyo 2020. What started as a moment of great pride, as she was bestowed the honour of lighting the Olympic torch, ended in a disappointing defeat to Markéta Vondroušová. She admitted afterwards that she didn’t “cope with the pressure”. 

Osaka soon returned to the headlines in Cincinnati when her first press conference since the French Open row was tearfully interrupted. Asked by a local reporter, Paul Daugherty, of the Cincinnati Enquirer, how she intends to marry the discomfort of dealing with the press and external interests that are served by having a media platform, she gave an insightful response on how she is “not really sure how to balance the two” before the moderator had to press pause and usher her out of the room. 

While Osaka returned to answer a further question in English, and several in Japanese, the fireworks had begun. Her agent, Stuart Duguid, promptly released a statement branding the reporter a “bully”, and claiming that his “sole purpose was to intimidate”. 

Once again, external noise had blown way beyond Osaka’s control, and her tennis didn’t do the talking. She was beaten by unfancied Swiss Jil Teichmann. 

It was a similar story in New York as her title defence was ended by Leylah Fernandez – the Canadian teenager who went on to lose to Britain’s Emma Raducanu in the final. 

Both Teichmann and Fernandez dismissed many other top-class performers in their respective runs to the finals in Cincinnati and at the US Open, but the results were enough to convince Osaka that she needed to step away from the sport again. 

“I feel like for me, recently, like, when I win, I don’t feel happy,” Osaka said while fighting back tears after her US Open defeat to Fernandez. “I feel more like a relief. And then when I lose, I feel very sad. I don’t think that’s normal. I didn’t really want to cry, but basically, I feel like… I feel like I’m, kind of, at this point where I’m trying to figure out what I want to do, and I honestly don’t know when I’m going to play my next tennis match. But I think I’m going to take a break from playing for a while.”

So here we are – in the present. One of the sport’s most engaging, thought-provoking, talented, and marketable athletes is unsure of what lies ahead. 

If, from the outside, Chapter One appeared to be a straightforward, meteoric rise to the top, it overlooked the internal turmoil that rested within. 

Future documentaries on Osaka have been tentatively floated – although it’s understood they will likely be produced from within her camp next time – so further accounts are expected to be offered to explain this tumultuous period and connect some of the dots. 

For now, what is clear is that this is a young athlete at a crossroads in her life. The life she’s always known – one that has made her so admired, wealthy, and successful – is one that is currently not bringing her joy. Osaka is a deeply inquisitive and intriguing character, who challenges cultural norms, and who won’t simply accept the status quo. She’s a person who is socially awkward, but artistically talented, and caring about a world far beyond her own. 

What isn’t so obvious is where she goes next. Will she come back with a vengeance, rediscovering that fire and fight that made her the world’s best? Or will she decide, as is her right, to focus her efforts on other passions, to master other crafts? 

As was evident in her questioning of her own success, Osaka is one to deeply review and assess her own standing. Has she done enough? Can she do more? Is it all worth it? 

What she decides and when that decision will come remains unknown. For now, we have to wait patiently to turn the page to the start of Chapter Three. 

 

Story published in Courts no. 2, autumn 2021.

2021, US OPEN © Ray Giubilo

Elegant, Competitive, Global

Roger Federer 

On His Two Decades on Tour

© Ray Giubilo

“I thought to myself, if the greatest player ever, Roger Federer, sat next to me one day on my 30- minute train journey into work, what would we talk about? What do I want to know from him? And in one word it came down to longevity, which was also relevant to the heritage of the Wilson brand. I wanted to know how this guy with four kids who’s a couple of years away from being forty is still able to compete at the very highest level in professional tennis.”

That was the challenge Courts Magazine and Wilson set for Louis Castellani. When the 45-year old, father of two, and life-long tennis fan is not being a lawyer in London, he’s on a tennis court or messing around with his hobby Instagram account @vintage.tennis. His tennis idols are Borg, Lendl, Sampras, and Federer.

August 2019. Roger was competing in Cincinnati and had beaten Juan Ignacio Londero 6-3 6-4 the day before. Louis was on vacation sipping a Campari when suddenly his phone rang from a mysterious Swiss mobile phone number: “Hi, it’s Roger…”

 

Louis Castellani: You’ve been on tour for a couple of decades and, in that period, you’ve maintained the highest of levels ever. At this stage of your career, what is the hardest part of life on tour? 

Roger Federer: I think organising the entire family to get on the road takes major organisation and planning skills, but also patience, because it’s just a lot of work. But as long as it is all worth it, and the kids are happy on the road, and we are having a good time, it’s all good. 

As a player, I think it’s just how you keep the fire burning because I’ve been to certain tournaments for 20 straight years. You still want to make it as special as it would be your first, second, third time, or like when you first tried to defend that title. 

I think just being able to keep that going, I need a really strong team around myself that also helps me to squeeze that extra one percent out of me, and reminds me to bring the energy for the next match. In terms of physicality, I think just listening to the body, the signs, and managing a good schedule.

 

LC: The physicality of playing on tour for a long period of time, has that required you to adapt what you do off the court with training and fitness?

 RF: I think, in the beginning, when you’re younger, you have to put in the hours, and be able to stay focused, prove to yourself that you can stay with your opponents, focus on the ball for two, three, four, five hours a day. And that also physically, you can endure the stress and everything. 

It’s one thing doing it in practice, but it’s also another thing being able to prove it in matches when the stress level gets greater. You could cramp because of stress, playing with fatigue like jet lag, changing surfaces from one day to the next. In the beginning it’s all a learning experience, but you have to learn quick. 

And then later, you know it all so you don’t have to work on it that much anymore. I believe in quality over quantity, if you like. 

 

LC: You mentioned jet lag there. I think we underestimate the effect it has on those early rounds when players arrive just a few days beforehand. Do you have to think about that as part of the schedule? 

RF: 100 percent. That’s why you sometimes, as a professional, can say, “OK, I’m going to sacrifice a few more days at home to leave early for the tournament to get over the jet lag”. The thing is, you just don’t know if that’s really going to make a difference in the draw, and sometimes being home for a bit longer makes you maybe a bit more happy, so you always have to weigh it – is it worth it? 

But that’s why maybe you would try to have a schedule that doesn’t make you go from South America to Asia to America to Europe to Africa to America, so you try to have it in swings rather. But I do believe when you’re playing with jet lag, you have a bigger risk of injuring yourself. 

The body might be sleeping and you’re awake or vice versa. Maybe you’re feeling all of a sudden tired when the third set rolls around. I do believe how you manage jet lag and how you manage your flight and pre-flight routines make a difference in your health throughout your career.

© Antoine Couvercelle

LC: We often hear tennis pundits talk about the challenges of playing five sets because it doesn’t happen at that many tournaments anymore. What’s the toughest bit of recovery for the next match when you’ve won in five sets?

RF: I really think you can’t put a finger on it. I think the overall energy comes down a little bit, that explosiveness maybe, you know, that peak of point for point mentality, and that sharpness you have maybe has just been shaven off a little bit when you’ve played a five-setter, so you really have to give extra effort to recreate that energy. 

That’s one thing I see that maybe younger guys struggle with the most, and maybe even when you get older, too, but obviously the problem is, if you’re playing five sets, and you’re carrying somewhat of an injury, that injury will only increase as the tournament goes on, and that’s why people do say, “you can’t win a slam in the first week, but you could definitely lose it”. 

 

LC: You touched on injury there. How do players play through an injury and still manage to be competitive on tour?

RF: I think it’s important to listen to your body and understand the signs of the body, and as long as you know that the injury cannot get worse, or much worse, it’s worth playing, I believe. 

If you know that you could literally snap a tendon or you could break something by playing further, if that’s going to really damage the future of your career or take you out of the game for a long period of time, you’ve got to really weigh it up – is it worth it, you know. 

But then, you could always just not walk on court the day of the match, just because it’s like, “I just cannot take this chance right now,” but more often than not, I believe you can navigate through the pain or the injury and I always tell myself, well maybe my opponent is also carrying something, or maybe it’s gonna start raining. You never know, but you might get lucky, and you win a match, and the next day you feel better. 

 

LC: Do you consider the November-December period before Australia as your off-season for recovery or your pre-season to prepare, or a bit of both? 

RF: Yeah, I mean, obviously, it sort of resets January 1st in a way. It used to be the classic off- season where you’re taking a break and then you’re really having the pre-season right after and you train really hard. 

But since I schedule a bit differently now and I have a family as well, I have several of these blocks – usually two of them: one at the end of the year and one mid-year. In the previous years, I had one during the clay-court season. 

This year, I didn’t because I’m still profiting, I think, from working hard in those off-seasons. I think they’re very crucial for a player because when you are able to take six to eight weeks off, take a proper break of, maybe, 10 days to two weeks, and then train really hard physically, and eventually also add tennis to that, you can really improve your potential. 

The problem is that if you’re only playing tournaments all the time, and not taking enough time to practise, you actually will not really improve. You become a better match player, you become match tough and all that, but actually your shots or your game are not really evolving and that’s why I’m a big believer in training blocks. 

And very often you see, when somebody does return from injury, how hungry, fresh and rejuvenated they are, you know, you see it very often so it shows taking breaks sometimes is a good thing. 

 

LC: In 3 words how would you describe the tennis culture today? 

RF: I think tennis has always been an elegant sport, so I’d say elegant. I think people see it that way, too. There is, sort of, the ballerina aspect as well that we have on the tennis court. I think it’s an arena sport, you know, in a way. I think the stadium’s big but not too big so it’s intimate and really elegant. It may be one of the most global sports. We go on the world tour from January to November, so I always compare it to us being musicians going on a world tour. Musicians don’t do it every single year but we have to, and we do it every single year so I think it’s super global. And then, I just think it’s competitive. It’s super competitive. There’s a lot of tennis players out there. With that ranking system, you have to defend what you did the year before. You’re only as good as your next match, and it makes it very hard, you know, in some ways, to be at the top, and I think the competition is huge, so I’d say it’s elegant, global, and competitive.

Australian Open, 29/1/2017, Men's Final © Ray Giubilo

LC: Has tennis taught you any lessons over the years that you think are relevant to real life off court? 

RF: Oh yeah, of course. I think anticipation. On a tennis court, we anticipate every single move, “Is he going to play there or there?” I think, in life you sometimes do the same. We try to plan a lot, and as tennis players we have to make decisions, micro decisions, “What’s going to happen next, where shall I serve, what am I going to do.” 

But then, also just in general, too, from a business perspective, I have to make so many decisions. And then when it comes to being able to battle through the sort of perseverance that we were talking about before, you know, fighting through injury, overcoming tough moments, coming back from defeat, how do I handle it now coming back from my Wimbledon loss. How do you get back from a moment like this and how you stay motivated after you’ve won it all – I’ve done that. I see a million things that I’ve learned from tennis and I’m super grateful. 

 

LC: You talked about the business world before. Relationships come and go, and in tennis, you very rarely see an athlete stay with the same set of partners for their full career. You’ve done that with Wilson. 

RF: Wilson is very strong on grass roots, you know. As a junior, you’re not really aware of it, all I remember is that a lot of my friends all played with Wilson racquets, and then my heroes played Wilson, as in Sampras and Edberg, and that’s the racquet I wanted to play with. 

And then when I got to know them, even at a junior level, they were all very supportive and helpful when it came to providing a grip here or a string there or whatever. I just always felt like the local people at Wilson were really well-equipped to help a young player to feel special. I think that was nice for me especially with my parents who come from very normal backgrounds. We were happy with any support we could get, like getting a free racquet which was very helpful at a young age. 

I think, in some ways, you are also forever grateful for that. And then, just getting to know top management and the people at Wilson, I feel it’s a family, and I always had a great time with them. We never had any issues and I don’t see myself ever changing – I remember where I come from, where they’ve been with me all along the way. This is more than just a business agreement in my eyes. 

 

LC: Playing on the Centre Court in SW19, all quiet and hushed, and then heading to Arthur Ashe in New York – those are very different environments for playing tennis. How do you keep focused? 

RF: The good thing is that a lot of the practice courts are very busy and loud. Like here now [in Cincinnati], I was practising next to a ventilator the last few days. There are trucks driving in and out, there are the fans – the practice courts usually are a more, sort of, savage environment. When you go on a match court, it’s much easier to focus. 

I know the US Open might be tough, because it’s loud, there’s the pressure of the stadium, you hear the subway going by or a train on the track, you smell the grill of the hot dogs and all that stuff, and it’s loud at the change of ends – they play the music and people are dancing – and there almost is this culture, the fans are talking during the point to some extent, because that’s what fans are allowed to do in basketball, baseball, and NFL. 

I think that’s the beauty of our sport. What I like about the US Open, about the pressure of the US Open and Arthur Ashe, is that you feel the people show up there, it’s like at the movie theatre – they eat their popcorn, and then they are waiting for something to happen and then once you start making good shots, good points and you show you are engaged, this is when they are like, “Oh, right this is when the movie starts, this is the entertainment factor we’ve been waiting for and looking for,” and that’s when they engage fully and they’re one of the most incredible crowds in the world that I love to play in front of. 

I love playing at Wimbledon, too, and if you ask me as a tennis guy, I’d probably pick Wimbledon, but the combination is crazy good, and I love both equally.

 

LC: Looking back, what advice would you give to your 20-year-old self? 

RF: Well, it’s funny, you know. In a way, I’d say, “Hey, don’t worry. You have time, Roger,” and at the same time, “It’s going to go by fast.” It’s a bit of both because you know a lot of the time when you’re young, you’re like, it’s got to happen right now or tomorrow. At the same time, you realise that, “Hey, we have time, take your time, practise, don’t stress out about everything.” 

So I think it’s important to enjoy it, not stress too much about every little detail to begin with, try your best, learn quick. And then trust your coach and trust the training, and really get stuck into the details because I do believe at the very top on the professional tour, it’s the details that make the difference.

 

LC: Last question. What advice do you think your 50-year old self would give you now? 

RF: He’d tell me to play for a few more years! 

 

LC: I thought you might say that! 

RF: Really? I don’t know, I’d be like, “Come on, Roger, try to play as long as possible and enjoy yourself.” I hope that’s what he would say! 

 

Story published in Courts no. 2, autumn 2021.

Courts Magazine Travel

 

Eat. Play. Love.

 

A travel guide for tennis-lovers
by Mayleen Ramey, host of Racquet Roadtrip.

© Geordie Anderson

I can’t remember a time when I wasn’t travelling or playing tennis. My childhood as a competitive tennis player and career as a TV host are filled with memories of courts and planes. 

Unable to travel during lockdown, I started exploring destinations a little closer to home and realised some of the most beautiful places to play were in my very own backyard. Discovering dream courts and the surrounding areas became an adventure in itself that I look forward to sharing in my new travel show, Racquet Roadtrip. 

Here are some of my favourite finds in Los Angeles:

Santa Monica © Geordie Anderson

Santa Monica

Ocean View Park

As Angelenos, we are fortunate to have perfect weather year round and a variety of public tennis facilities, but none are as perfectly located for a California beach experience as Ocean View Park. These courts are the closest you can get to playing tennis in the actual sand. This 5-acre oceanfront park features six tennis courts that are open to the public and, best of all, free during the week (bookings are available on weekends, starting at $5/hour). 

For a true LA après-tennis, kick off your sneakers and step straight onto the golden sand of iconic Santa Monica beach. Bring your own picnic or level up your experience with Santa Monica Picnic Co, who will prepare an elegant gourmet picnic with local artisanal cheeses and baked goods, ready for your arrival. Either way, plan your court time accordingly to catch the spectacular sunset!  

Malibu Racquet Club © Geordie Anderson

Malibu

Malibu Racquet Club

For an equally breathtaking, yet a far more exclusive court, follow the coastline north to Malibu, where you’ll find a gem of a private tennis club. 

Built into a lush hillside, with sweeping views of blue skies and sea, Malibu Racquet Club embodies sporty sophistication with a coastal flare. The eight tennis courts and modern rustic clubhouse are nestled amongst winding paths, lined with a mix of palm trees and cacti. You’ll never want to leave this tennis oasis and, thankfully, short-term memberships are available, starting at $500/month. 

For a taste of the good life without the fees, the club’s Sparrow Cafe is open to the public during the week. Dine al fresco on the terrace overlooking the impressive tennis courts and beautifully-designed landscape, while enjoying delicious Californian cuisine.

 

For updates and more tennis travel adventures, follow along on Instagram: @mayleenramey, @racquetroadtrip.

 

Story published in Courts no. 2, autumn 2021.

Petra Leary’s Aerial View

© Petra Leary

Chances are that, while you have seen the world from an aerial perspective, you have never seen them quite the way New Zealander Petra Leary does. She introduces us to dronescapes that blow the mind, that recall the classic, sharp, graphic, eye-catching art of the past, that define brand new boundaries and then push and pull at them, and she does it all with a spellbinding beauty, as if she were weaving a web to trap her viewers in. The tennis court was always going to attract her interest. 

It’s no wonder she has already won multiple awards in her career. Petra is down to earth and will make no mention of the awards, only informing me of those she has collected – a substantial list for someone so young – after I have enquired about them. 

I meet Petra via the wondrous window of a video chat connecting us from our distant continents (she is at home in New Zealand, I am in Germany). For the night-time, she is in a sugary, yellow, and energetic mood, as she tells me upon asking for a colour and a flavour to describe her feelings. She is itching to go out, the (freshly reinstated New Zealand) lockdown blocking her, curbing our instincts as ever. 

She got into the world of drones when one of her drone operator friends gave her a turn on one, and she became instantly hooked. When we discuss inspiration, she mentions the Daily Overview on Instagram, an account which has satellite images from around the world, aerial photography, and drone imagery, “where everything looks so abstract”. “It’s very inspiring”, she offers. Her passion for the whole subject immediately stands to attention. 

Petra loves being productive, has many creative friends, and draws inspiration from hip-hop – naming Kendrick Lamar and Drake as present figures of interest – and her own graphic design background. She also loves basketball courts as they combine well with hip-hop. A love of all things visual becomes apparent very quickly, filtering into every corner of her own creations. 

The tennis court, along with other well-known sporting environments, is one of the remarkable optical shapes that fascinate Petra. In fact, no sporting court, pitch, or structure is safe from her overhead gaze. 

The shadow play snatches the breath away as her aerial world comes to life – the object or character (if there is one), the shadow, the setting. It all combines to birth a world that is both fascinating and bold. 

Petra sees everything in an extremely vivid way and expresses the desire to communicate her graphic world through photography, regardless of the subject she is capturing. She uses several different drones, at times in pre-planned shoots and at others in the spur of the moment. Her drone images fall into the territory somewhere between photography, the cyber world of graphic design she hails from, and sharp paintings and abstract art of the past – such is her ability to depict what is in her mind. There is both the pure and familiar as well as the alien in her work, ensuring that she takes it far beyond mere photography. As she herself states, “I like to take photos. I like that my idea of work is photography, but it’s more art, it’s never just a photo.” She establishes her work thoroughly within the terrain of art, and looking at the stunning photographs on her own website, as well as the Courts one, it verifies the theory that it is far more than mere photography – it creates its very own reality, seen from above, by the one down here on earth, her parallel dimension. 

© Petra Leary

Tennis courts are one of the unique sporting shapes that, if caught by the best eyes and their lenses, create a stunning visual, and therefore figure quite prominently in Petra’s work. She sees the role of art in tennis as one that can only build its profile and take it to a larger audience. She gives the example of a clothing brand, started by a skateboarder in his forties she knows, that explores tennis fashion by expanding its own reach and paying tribute to a classic past era of iconic clothing within the sport. This takes the sport beyond its typical parameters, and opens new doors for tennis as it modernises and finds itself in the new ground, with new, young fans taking an interest – art as a window of opportunity for a new tennis audience. 

“I played tennis when I was quite young. I like playing for fun, but I don’t really know the rules very well,” Petra informs me regarding her own experiences of tennis as a sport. She doesn’t have a favourite player though she does have an entertaining story that sticks out for her about a big name player. She remembers the name of Lleyton Hewitt, from neighbouring Australia, as her grandpa would not let her wear a baseball cap back to front in his presence because it reminded him of Hewitt – a player he didn’t like. As she shares this anecdote, a fondness for both her grandfather and the essence of the story light up her features (in part framed by a baseball cap worn in her favoured reverse position). 

Petra loves the geometry and line work of the tennis court, and all sports courts – structures representing endless possibilities despite their definite shape. Speaking of courts, she says: “The graphic aspect means it almost resembles an illustration. They look great with or without players. Different coloured surfaces, different materials.” Bringing a sport that historically resided within the arms of a more elite society to the masses can only be good for tennis, as its arms reach out, branch-like, into other avenues of society. She hits the nail on the head when she acknowledges the potential of a tennis court, with or without players thereupon, to be far more than a mere sporting structure upon which a match takes place. The shape and lines already make it a work of art, before the action has even commenced, before a photo has even captured its staggering majesty. Far more than a blank page, even at their most inactive point, stories are being told by courts, tales of unspoken poetry – and Petra is surely leading the way in the aerial tennis court stakes – as our attention is being demanded. 

Therefore, familiar shapes take on a newness, deliver a fresh zing to the eyes, dazzle and enhance one’s surroundings as well as the views they capture in Petra’s images. They send us to new places, invite us into our delicious dreams, and open our minds to what is possible through photography as it spills out as the ultimate creative voice. It is no stretch for the imagination to picture tennis played out, with all our favourite faces, in these sublime otherworldly settings. 

When I ask how her native land affects her work, she tells of how the ruthlessness of sunlight, unique to New Zealand, pervades her work, bringing a startling quality to her bird’s eye perspective. Nothing is safe from Petra’s roving drone eyes, and we are invited to look at familiar land, happenings, daily events, and courts as never before. “New Zealand is a small place, and you get to know everyone, which is handy to access clubs and courts. It’s easy to make connections. “The environment of New Zealand has some of the harshest sunlight,” she says, before she goes on to describe it as incredibly bright, adding that it delivers harsh and proportionate shadows. That, in turn, enables her to take a good picture of what people are doing. Her images capture an exact moment in time, fixed, forever recorded, and yet they also seem like fluid scenes playing out before the eyes, non-stop motion, bigger than the cages of mere still life photography. 

Of course, during these challenging times, the pandemic has had its impact on her creative progress. However, she has been “motivated to do 3D art and make these worlds that I have had in my head. Inception tennis courts. Balls floating everywhere. Inspired by not being able to go outside. Now, I’m going through old images and playing around with those. Discovering new techniques and software.” 

© Petra Leary

Petra also tells me of a big shoot planned with an Auckland tennis club. It will see 1,000 tennis balls, all moving simultaneously across the court in a lively and exciting project. Her ambition to explore the realms of tennis shows no signs of waning. The event has sadly been affected by Covid, but will hopefully be able to happen soon, making it something for the artist in us all to look forward to. 

At present, she is working on a project in which she has been asked to design a basketball court – she sees it as an illustration with extremely graphic elements. She had completed a separate basketball shoot before the first lockdown, further verifying her ability to capture courts in all their appealing glory. 

When I ask how she would like to be remembered post-career, she considers this question for longer than others before responding, “I’d like to be remembered by an augmented reality gallery that was immersive and interactive, where people could walk through the thousands of photos as interactive scenes, and was in, a sort of, inception layout like on all surfaces (floor, roof, walls).” When I ask for her to expand on the ‘inception’ concept, she explains, “… what I mean is that sort of 5D world where things are not constrained to one ‘ground’ and are able to come off all walls.” Petra’s ‘inception’ can be characterised as the fabrication and cultivation of a fantasy dreamscape, her own world, an immersive installation. 

When I ask if she sets limitations for her creations, she tells me, “Anything is really possible, if you want. A matter of figuring out how to do it. It can be harder, but you can find a way, be it alone or with help.” Even before posing this question, this had become quietly apparent to me through both her words and online portfolio of work. 

As we wind down the conversation, I ask for some information about Petra that might surprise people. I learn that she loves to play video games, that her Instagram account reveals her love of Lego, how she enjoys making scale size courts from the well-known bricks, and that she is an ambassador for ADHD in New Zealand. Earlier, she informed me that she has lately been watching Bob’s Burgers and The Wire. It appears that the visual, the tactile, and the stunning is a distinctive part of Petra’s everyday life, something she absorbs, infiltrating her consciousness from all around, and subsequently emerging from her own capable artistic hands in new shapes and forms, as if golden eggs laid by a hen. 

Petra’s career is one to follow, ever worth tracing her steps – and where she goes next – as her work entertains, challenges, and thrills. In a world over-saturated with cyber content, it is such artists and creators of admirable and far-reaching projects that make it all worthwhile. You cannot fail to be impressed by what she is doing, as someone within as well as beyond the tennis spectrum. 

If we are going to be watched from above, Petra is the one we would want to be controlling the drone, for she is an expert at capturing us and our surroundings in all their dramatic glory. 

 

Story published in Courts no. 2, autumn 2021.

© Petra Leary

The Next Rule Change in Tennis?

Wimbledon 2010 © Ray Giubilo

The rules of tennis have remained remarkably unchanged over the past 100 years, but in a constantly evolving world, change cannot be far away, can it? So what rule changes might there be – both plausible and less plausible?

Imagine a football match where the two teams walk out about seven minutes before kick-off, and proceed to kick the ball to each other. After a couple of minutes, one goalkeeper says to an opposing striker, “Give me a couple of high balls so I can practise catching crosses.”

The idea is absurd, yet that’s what happens in tennis. The players walk out, they hit with each other, one player comes to the net to practise volleys, then asks for a couple of high balls for smashes – all against the opponent they’re going to try to outwit over the next two hours. No player ever dares to walk straight to the net and practise nothing but volleys for the five minutes of the warm-up, even though it would probably unsettle their opponent.

Customs such as the gentle warm-up, apologising for netcords, and standing aside politely for opponents to cross at change of ends have survived into today’s highly competitive tennis world. And many of the rules are the same, too. Despite advances in space-age racquet technology, the court is the same 78ft by 36ft (23.77m x 10.27m) as it was when the ‘hourglass’ court was abandoned in the early 1880s. The net is still three foot in the middle and 3ft 6in at the sides (0.91m, 1.07m), and the scoring system has remained the same, bar the introduction, in the 1970s, of tiebreaks and, this century, of sudden death at deuce, and super-tiebreaks in tour doubles events.

So if the rules are one day going to change, what is likely to happen? Here are some of the possible rule changes that we might see over the next few years.

 

Abandon the ‘let’ serve… This is already happening in junior and college tournaments, so unless there is a behind-the-scenes lobbying campaign by the makers of the ‘trembler’ devices umpires use for calling ‘Let’, this is most likely to be the next rule change. Tennis is supposed to be continuous, and having to retake the serve three or four times, because the ball brushes against the net on its way over, makes no sense.

Traditionalists say that you risk a tournament being decided on a serve that drops stone-dead over the net, leaving the returner with no chance of reaching it. This is true, but imagine how exciting that would be! Anyway, this does happen in open play, and tournaments have been decided on a lucky groundstroke or a volley catching the net (eg. Lendl versus Becker, Masters final, New York, 1988). Abandoning the ‘let’ serve would speed up tennis matches, add extra drama, and stop players from standing so far back to return a serve. It has so far spawned an imaginative variation in doubles: if the ball hits the net, the non-returner is then allowed to return it, which means the non-returner has to be extremely alert.

This rule change will also prevent cheating. That’s the reason college tennis has adopted it – unprincipled returners, who are aced, have been known to say, “That was a let, wasn’t it?” when the ball went nowhere near the net. In fact, there is so much in favour of this rule change, one wonders why it hasn’t yet happened.

© Peter Northall

Stop the retaken toss… Another obvious development is to stop a server from catching the ball if their toss is not in the right place. This is another custom that, even if there’s no malice afoot (and there sometimes is), slows down the match. Imagine a pitcher in baseball saying, “Sorry, I’m taking that again as I didn’t throw it right,” or a penalty-taker in football saying, “I’d like that again please because my feet weren’t in the right place when I started my run-up.” Again absurd, yet that’s effectively what a tennis player does when he/she catches the ball, whether with a “Sorry” or not. Once a ball leaves the player’s hand, that’s it – the serve should be in motion, and if the ball doesn’t land in, it’s a fault. The only reservation about this is how easy it would be for an umpire to tell whether the ball had actually left the server’s hand, but that ought to be possible.

There may be objections to this rule change from those who view the ‘yips’ as a form of mental health issue that should attract sympathy, and not punishment. The ‘yips’ is a term originated in golf, about players whose putters shake when they attempt a short putt, and it has been adopted by tennis to denote someone who can’t get the ball toss right. One can indeed have some sympathy, especially as most players will be able to perform a perfect ball toss if they don’t then have to hit the ball, but the solution in a competitive sport cannot be to allow a player to toss the ball as often as he/she likes until it’s in the right place.

 

Abolish the first serve… Still on the serve, why do we offer players the chance to retake their serve? That’s what the two serves rule amounts to. You can go for a big serve, and if you miss it, you can have a second try, old fellow. The impact will be that we will lose a lot of the big serves, and we may never have another serve speed record broken again, as all serves will effectively be second serves, but will that really make tennis less interesting? Compare it with other racquet sports, such as badminton, squash, or table-tennis – they manage with one serve, so surely tennis can, too. Second chances in life are fine, and there are plenty of second chances in tennis (you can play a horrendous set and still win a match), but there should be no second chances on the serve.

The problem with this rule change is that it would need approval from the International Tennis Federation (ITF). There are permitted variations listed in Appendix V of the Rules of Tennis, but this isn’t one of them. Therefore, a tournament couldn’t just do it, it would have to apply for special permission, or lose any official status it might enjoy.

 

Taking away the leftie’s advantage… The idea that left-handers have an advantage over right-handers has long been dismissed as nonsense (by left-handers, of course). But one area where the leftie does have an edge is that most of the big points in tennis come in the advantage court, so a big, away-swinging, left-handed serve is more effective than on the deuce side of the court, where the right-hander has the corresponding advantage. That prompted a suggestion to the ITF, many years ago, that left-handers should start their games from the left side of the court, so, for example, at 15-30 they’d be serving from the right side. There’s nothing to stop it from working, except that it has yet to be given official approval, and players would have to stop using terms like ‘deuce court’ and ‘ad court’ as they would mean different sides to lefties.

 

Underarm serve… This is not so much an area where the rules might change but an area where people need to realise that there is no rule! Underarm serving is legitimate. Indeed, why shouldn’t it be? The ball is tossed, albeit very low, and hit into the court. There are some interpretations of tennis etiquette that say a player should indicate before he/she serves an underarm serve, but that takes away the element of surprise. An underarm serve has been used to save a match point in a Grand Slam final (Martina Hingis at 2-5 in the final set against Steffi Graf, Roland Garros, 1999; Hingis lost the match a few minutes later), so it shouldn’t be left to independent, spirited players like Nick Kyrgios and Alexander Bublik to use underarm serves. Come to think of it, why has no-one used a heavily sliced underarm serve against Rafael Nadal at Roland Garros, given how far back he stands to receive serve? It might unnerve him.

© Ewout Pahud

Court dimensions... This is an area where the scope for changing where the lines go is very limited. The beauty of tennis is that the dimensions are the same, whether you are at Wimbledon, or in a park, or concreted multi-sports area in any town or city in the world. But what could change is the introduction of a maximum area for professional tournaments. There is currently a minimum area – a professional tennis court must have a minimum of 400 square metres of space, to include the runback and the area at the sides. But do some players gain an unfair advantage if the space is well over 400 square metres?

The current recommended playing area for Grand Slam show courts is just under 670 square metres (18.29m x 36.57m), and the total playing surface at the Rod Laver Arena and the Court Philippe-Chatrier are thought to be much bigger (getting an exact measurement is difficult because you need to deduct the space taken for the players’ and umpires’ chairs). But is this too big? There are those who believe that part of the reason Rafael Nadal does so well at Roland Garros is because of the large runback and space at the sides, and if it could be empirically proven that certain players do gain an unfair advantage, the case for a maximum playing area – enforced by fences at the sides and back – could be credibly presented.

 

Racquet materials… The debate on the materials used for making tennis racquets has gone quiet in recent years. The fear in the late 1990s, that the big servers were killing the game, has largely abated, in part because the big servers have spawned a generation of sharp-eyed returners. And let’s face it, the power-to-weight ratio of the modern, composite racquets has revolutionised the life of hobby tennis players, so it would be a backward step to force them to use wood.

It’s also not 100% clear that a return to wood, and the old dimensions of a 27-inch length and a 9-inch width of frame (68.58cm, 22.86cm), would actually guarantee varied tennis with slices, volleys, and drop shots. But if it were proven that limiting racquet materials to wood, resin, and a limited amount of metals (for reinforcement purposes) would make professional tennis more attractive, then the debate about materials will resurface. We have been blessed with a generation of varied players headed by Federer, Nadal, and Djokovic, and the current young generation includes the diversity and volleying skills of Tsitsipas, Shapovalov, Kyrgios, Musetti, Barty, Krejčíková, Fernandez, and others, so variety isn’t currently an issue. But if we end up with a top generation of players who all play the same way – such as Sinner, Alcaraz, Ruud, Ruusuvuori, Rublev, Khachanov, Auger-Aliassime, Zverev; and Osaka, Sabalenka, Sakkari, Raducanu – and the attractiveness of tennis wanes because it’s seen to be boringly one-dimensional, then the question of whether to change the rules in order to limit what materials can be used will resurface.

Cricket had this issue in the 1970s when a prominent Australian, Dennis Lillee, walked out to play with an aluminium bat – he was told to replace it with a wooden one, a rule confirmed by the international cricket authorities, and to this day cricket bats at all levels of the sport can only be made of wood.

There may come a time when strings have to be more closely regulated. Currently, there are absolutely no rules about string materials (stringing patterns, yes; materials, no), so you could use very thin ship’s rope, shoe laces, dried spaghetti, or garden twine if you wanted to. Talking of spaghetti, the ITF’s view of stringing was strongly influenced in the mid-1970s when a new form of knotted stringing, called ‘spaghetti stringing’, was used. It created so much topspin that there were several freakish results on the professional tour. The ITF quickly banned both spaghetti stringing and another invention of the time, double-stringing (two strings next to each other), on the basis that it was too much change at once. You could argue that today’s synthetic strings give as much topspin as the spaghetti and double-strung racquets of the 1970s, but as the evolution has happened gradually, there has been no ITF intervention. Roger Federer told the Courts podcast in 2019 that he sees strings as having the greatest scope for tennis technology to improve over the next few years, so the rule-watchers at the ITF will have to keep their eyes peeled.

2021 ROLAND GARROS Roger Federer (SUI) Photo © Ray Giubilo

Scoring systems… This is the area where tennis has been less conservative in recent years. The seven-point game with no Advantage, the first-to-10-points tiebreak instead of a final set, and the short sets used at the ATP NextGen Finals have all been introduced over the past 20 years, as well as tiebreaks in final sets at the Australian Open and Wimbledon. The permitted variations of scoring are all set out in Appendix V of the Rules of Tennis, so if you wanted to, let’s say, use the squash scoring system of the first-to-11 points (maybe best-of-five games played to 11 points), you’d have to get permission or lose your official status. Interestingly, Appendix V doesn’t explicitly allow for a super tiebreak to be used in the final set, only instead of a final set, so the Australian Open is technically in breach of the Rules of Tennis, but don’t tell anyone, as first-to-10 at 6-6 works quite well.

One suggestion made many years ago was that the server should win five points to win a game whereas the receiver should only have to win four. Known as ‘the 50-40 system’, it would effectively make it a sudden death at 4-3 to the server, or ’50-40’. The idea never caught on.

 

Change the foot-fault rule back again… The foot-fault rule has twice been changed. It started in its current form where a server’s foot cannot touch the ground inside the court until he/she has hit the ball. Then, it was changed in 1908 to require servers to have part of one foot touching the ground when they hit the ball. In 1961, it was changed back to what it is now. The idea of changing it back again is nowhere near the tennis agenda, but it could quickly become an issue. As players seek every little advantage, it’s possible that a player could stand well behind the baseline at the start of the service motion, shuffle up to the baseline, toss the ball forward and jump into the air, hitting it just before landing. If that were to work, the server could be potentially two metres inside the baseline, which would make the serve that much harder to return (albeit very risky for the server, and they would need to have a good first volley).

Rule 18 of the Rules of Tennis says the server should not change position during the serve “by walking or running, although slight movements of the feet are permitted.” Aha, so what is the boundary of a ‘slight movement’ of the feet? Think of some of the recent servers, who seem to take two or three steps to get into their service motion (remember Karsten Braasch?). Which umpire would be brave enough to call, “Foot-fault – running behind the baseline!”? So, if players tried to jump into the court, and ended up half-way to the service line, then the idea of forcing the server to have one foot on the ground would quickly come back into discussion.

None of these rule changes are expected in the next year or two, and some are unlikely to happen at all. But all it takes is for one ambitious administrator to grasp the nettle, and any of these ideas – mainly the ones at the top – could suddenly become reality. 

 

Story published in Courts no. 2, autumn 2021.

LE GÉANT DE TANDIL

© Antoine Couvercelle

Juan Martín del Potro est le personnage mythologique par excellence. Il y a en effet chez l’Argentin un pouvoir magnétique tellement puissant, une structure physique, une force de caractère et un style de jeu si imposants qu’il en est à se demander s’il n’est pas en réalité la réincarnation de l’un de ces grands héros des légendes grecques. 

Le visage fermé par des arcades sourcilières protubérantes légèrement tombantes, le regard profond traduisant une imperturbable sérénité mêlée étrangement à la lassitude des gens ayant trop vécu… Tout comme ces demi-dieux à la responsabilité écrasante, il semble porter tout le poids du monde sur ses immenses épaules, mais aussi lorsqu’on ajoute l’extrême lenteur de mouvements et l’attitude totalement relâchée qui le caractérisent, il donne l’impression de vivre dans un espace-temps qui n’est pas le sien, d’être en parfait décalage avec le commun des mortels. Une discordance qui a tendance à s’intensifier lorsque ce colosse aux pieds d’argile fait son apparition sur un court de tennis. L’entrée est toujours extraordinaire. La tour avance, le pas est lent et lourd, son mutisme assourdissant, le temps semble s’être ralenti et on croirait voir alors Gulliver pénétrer le royaume de Lilliput. 

Il est d’une puissance sans égale, en témoignent ses frappes en coup droit d’une force brutale absolument désarmante. Le mouvement est aussi ample que le battement d’ailes d’un albatros, et la projection de son coude vers l’avant est faite avec une telle vigueur qu’il est difficile de ne pas faire une analogie avec l’artillerie du XVe siècle : on ne dit pas qu’il arme sa frappe mais qu’il charge son canon. Un geste à la fois pur et fulgurant dont la monstruosité se trouve décuplée lorsqu’il l’accompagne d’un râle à la gravité bestiale. 

© Hugue Dumont

D’apparence inébranlable, il est pourtant l’un des joueurs les plus fragiles du circuit. En effet, à chaque fois qu’il réussit à atteindre un niveau digne de lui et de son talent, il est alors contraint d’arrêter sa saison à cause d’une énième nouvelle blessure ou de la résurgence d’une ancienne. Il doit donc fournir l’effort de revenir au plus haut niveau, encore et encore et toujours. Cette histoire, aussi triste qu’elle est absurde, n’est pas sans évoquer le fameux mythe de Sisyphe. Les dieux avaient condamné Sisyphe à rouler sans cesse un rocher jusqu’au sommet d’une montagne du Tartare d’où la pierre retombait continuellement par son propre poids.

« Il faut imaginer Sisyphe heureux », disait Albert Camus. « Le chemin importe peu, la volonté d’arriver suffit à tout ». Une façon de dire que les combats valent la peine d’être menés ardemment, et cela malgré leur absurdité. « La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme », Juan Martín del Potro est ce même héros, supérieur à son destin, plus fort que son fardeau.

© Antoine Couvercelle